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L'Orthodoxie Moderne a-t-elle un avenir en France ?

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pomme
Messages: 76
@ Rav Yona Ghertman

La curiosité l'a emporté. Je n'ai pu me retenir de jeter un œil sur votre message.

Trois points rapides :

1) Vous avez judicieusement remarqué que l'explication que donne le 'Hazon ish sur le Rambam ne correspond pas aux dires du Rambam dans le Guide des égarés.

2) L'explication que vous donnez n'arrange malheureusement pas le problème.
J'avais signalé dans un de mes messages précédents (le premier en date du premier mai) que la question du 'Hazon ish repose également (il ne le signale pas lui-même, mais il faut l'ajouter) sur le fait que le Rambam dans Hil'hot Maa'halot assourot fixe que la Treifa est l'animal bessé à mort.

De ce fait il semble clair que pour le Rambam le cas des Treifot dépend également d'une classification générale : tous les animaux "blessés à mort". Comme pour les poux.

3) Par contre je pense personnellement (je ne l'avais pas dit jusqu'ici parce que je ne voulais pas compliquer les choses avec une déclaration de ma part allant à l'encontre de l'idée du 'Hazon ish) qu'il est possible de réconcilier les deux "Rambam" de la façon suivante :

Comme je l'ai déjà souligné plusieurs fois, le Rambam précise dans le passage du Guide des égarés en question, que si une tradition nous vient directement des prophètes, elle ne devrait pas être contredite par la science.
Il est dès lors possible que le Rambam considère que la hala'ha des treifot fasse partie de ce cas.
En effet l'idée des "Chmona essreh treifot" apparait déjà dans un Targoum d'origine bien plus ancienne que le Talmud. Et présente donc une tradition au moins pré-Talmudique. Peut-être le Rambam y voit-il une origine encore plus ancienne, remontant à "hala'ha lemoché misinaï".

C'était pour le coin "Limoud".
juif d'Israël
Messages: 73
@ Pomme

Concernant votre dernier message (adressé à ravyonaghertman)

1) et 2) d'accord.

3) Je ne comprend pas. D'après votre tirouts il sort que :

a) Rambam pense que les treifot sont les animaux bléssés "à mort".
b) Rambam pense qu'il faut faire confiance à la médecine.
c) Rambam pense que les treifot viennent des prophètes et ne doivent pas être contredites par la science.

d) Pourtant Rambam dit qu'en cas de contradiction entre Hazal et la médecine on suit Hazal. Ceci va soit à l'encontre de b) soit à l'encontre de c).

Alors vous n'avez rien répondu.
YonaGhertman
Messages: 43
Bonjour,

Merci à tous pour les références rapportées et pour les contributions de bonne volonté permettant de mener une réflexion constructive.

@ Pomme [à lire également par Shmouël pour la fin]:

Maintenant que nous nous sommes mis d'accord sur la stira apparente entre le Rambam de hilhot shita et du moré névoukhim nous pouvons continuer notre limoud sur de bonnes bases.

Je précise encore qu'en règle générale, il n'est pas forcément nécessaire de chercher à concilier une stira entre le moré et le mishné Torah. Au contraire parfois, les "réconciliations forcées" sont exagérées et oublient que les deux ouvrages ont un objectif complètement différent, que l'un traite d'Halakha et l'autre non.
Toutefois en l'espèce, il paraît assez étonnant que ni le 'Hazon Ish, ni le Yalkout Yossef ne mentionnent cette stira. De plus, j'ai regardé les commentaires du Rambam sur hilhot shita 10, 13 (iguerot haRama, hagahot maïmonïot, techouvot maïmonïot, migdal oz, maguid mishné, Radbaz, Kessef Mishné, Lehem Mishné, kiriat sefer, mishne lamelekh, yad hamélékh, R. Haïm HaLévy et Or Saméah) et aucun ne fait état d'une stira entre les propos du Rambam sur place et sa shita générale au sujet des sciences (représentée dans le Moré).
Force est donc de constater qu'il n'y a pas de stira entre les deux textes problématiques. Mais alors comment les concilier ?

J'ai vérifié le Rambam dans le quatrième chapitre de Maa'halot assourot (hala'ha 7). En effet selon le Rambam, la classification autour de la téréfa dépend d'un critère général. L'explication que j'ai voulu donner dans mon précédent message n'est donc pas la bonne.

Par contre, l'explication que vous donnez à propos du targoum faisant état d'un nombre de téréfot est intéressante. En effet, la lecture du moré 3, 14 laisse entendre à contrario que les données provenant directement des Prophètes ne sauraient être contredites par les nouvelles données scientifiques. Le Rambam établirait donc une distinction entre :
- les données apportées par 'Hazal en fonction de leurs connaissances scientifiques personnelles, susceptibles d'être inexactes.
- les données apportées par 'Hazal en tant que provenant des prophètes, celles-ci étant immuables.
Cependant, le problème de cette classification est qu’elle reste assez arbitraire. Comment distinguer dans le Shass l’origine des propos des Sages ? Comment discerner s’ils basent leurs propos sur les connaissances scientifiques de l’époque ou sur une tradition remontant aux prophètes ?

A propos d’un développement sur yom tov shéni shel galouyot, le Meshekh Hokhma rapporte une célèbre citation du Gaon de Vilna voulant que chaque guezéra ou takana prise par ‘Hazal pour un motif déterminé dans le Shass cache en fait d’autres motifs plus profonds que nous ne connaissons pas (Parasha Bo, s. v. « HaHodesh Hazé Lakhem »). Le Gra se montre donc très conservateur et refuse ainsi toute la littérature des Rishonim considérant que même une guezéra prise béminyan s’annule d’elle-même dès que sa raison disparaît (Méiri sur Betsa 5a, voir également le Rosh « shout harosh » klal bét, séif ‘het, et une discussion à ce sujet dans ‘Hazon Ovadia 3, p. 358 « dinéi holé shéin bo sakana »).

Même si nous ne sommes pas en l’espèce dans le domaine des guezérot et takanot, l’idée de raisons propres à ‘Hazal et non explicitées dans le shass existe également à propos des sciences. Dès lors, toute la « modernité » du Rambam dans le moré consisterait à avertir ses contemporains que les « données cachées » ne sont pas du ressort de ‘Hazal, seules les lois inspirées par les Prophètes ont des motifs non-dévoilés et ne peuvent donc pas être modifiées. Même à notre époque une telle déclaration est « révolutionnaire » et met à mal beaucoup de théories mystiques collées à tort et à travers aux déclarations de ‘Hazal dans le shass…

Les références que Shmoüel a rapporté sur les commentaires bibliques (que je n’ai pas encore lues) tendraient à montrer que le même raisonnement peut être fait avec les textes des Prophètes. La « modernité » voudrait donc que nous lisions les Prophètes en leur opposant les données scientifiques actuelles. Toutefois, je pense qu’il faut établir une GRANDE nuance : ces textes n’ont pas de nafka mina dans la Halakha. Sur le plan des discussions historiques relatives à la Bible, cela peut s’entendre de comparer les deux domaines (même si je ne vois pas l’intérêt d’une telle étude), mais concernant l’évolution de la Halakha, cela n’a pas de rapport. D’ailleurs les commentateurs rapportés (Moré, Ralbag, Radak) n’ont pas du tout vocation à traiter de question de Halakha.

PS @ Pomme : Merci de fournir la référence exacte du targoum à propos des téréfot. Par ailleurs, vous aviez fourni une référence qui m'intéresse pour mes propres recherches : 'Hazon Ish, Mikhtavim vol1, p.206. Je n'arrive pas à mettre la main sur cet ouvrage à Nice. Auriez-vous l'aimabilité de me contacter directement sur mon mail ([email protected]) afin de me faire parvenir ce texte. Merci d'avance.
Modern Orthodox
Messages: 43
Bonjour à tous,

Je n'ai malheureusement pas pu répondre à cette discussion qui a avancé sans moi, mais je vais m'efforcer de rattraper le train en marche :-)

Il est trop difficile de répondre à tous les points qui ont été soulevés. J'essayerai, pour l'instant, de m'attacher à deux éléments :

a) Le premier point est la contradiction apparente entre le Mishné Torah et le Morei Nevoukhim.

Tout d'abord, je tiens à présenter ma lecture du Morei Nevoukhim (III, 14) qui diffère de celle de pomme. Je m'en tiendrai à la traduction de Salomon Munk rapportée par Rav Ghertman.

"Il ne faut pas exiger que tout ce qu'ils ont dit relativement à l'astronomie soit d'accord avec la réalité; car les sciences mathématiques étaient imparfaites dans ces temps-là, et s'ils ont parlé de ces choses, ce n'est pas qu'ils aient reçu là-dessus une tradition venant des prophètes, mais plutôt parce qu'ils étaient des savants de ces temps-là pour ces matières, ou parce qu'ils les avaient entendu des savants de l'époque"

Je précise avoir également vérifier le texte dans sa traduction hébraïque (mossad harav kook) afin d'éviter toute erreur. Voilà comment pomme expliquait ce texte : « Des mots "ce n'est pas qu'ils aient reçu là-dessus une tradition venant des prophètes", comprenons que, pour le Rambam, si la tradition venait effectivement des prophètes, on se serait attendu à ce que leurs paroles fussent effectivement en accord avec la réalité. Comme je n'arrête de le clamer. » (message Posté le: Mer 04 Mai 2011, 7:20).

J'avoue avoir été profondément étonné par cette interprétation très haredite du rambam, qui ne colle pourtant ni avec le personnage, ni avec sa philosophie. Si on lit l'ensemble du chapitre, on s'apercevra que dans le paragraphe en question Rambam cherche (comme dans l'ensemble du Guide) à éclaircir les doutes de l'homme instruit (en sciences, cf. la lettre à son élève au début du livre). Lorsque l'homme instruit étudie le Talmud, il est saisi par de nombreuses erreurs scientifiques. Le Rambam l'admet totalement. Rien n'est plus vraie qu'une vérité, par conséquent, si le Talmud affirme quelque chose en contradiction avec la science établie alors c'est qu'il se trompe. Mais, car il y a un mais, si le Talmud se trompe, cela ne signifie t-il pas que toute la tradition soit erronée ?
A cela, le Rambam répond que non. Pourquoi ? Parce que les arguments scientifiques des sages ne puisent pas la source des paroles des prophètes mais des livres de sciences de leurs époques. Si ces paroles puisaient leurs sources chez les prophètes alors cela signifierait qu'effectivement la tradition est fausse (sic) et que la Torah n'est pas divine (SIC) !

Il est absurde de penser que le Rambam, qui établit la vérité comme élément le plus parfait (cf. son introduction au perek hakhelek ou il établit que le but suprême de la Torah est d'arriver à la vérité et ou il dit également « entends la vérité, d'où qu'elle vienne ») puisse dire que si la vérité contredit la Torah alors c'est la Torah qui a raison ! Évidemment, le Rambam est également persuadé qu'il n'existe aucune erreur dans la Torah, du moins aucune qui ne soit interprétable et explicable, donc en pratique tout va bien. Cette thèse sera redevellopée plus bas.


Voilà pour le Guide, qui introduit ma réponse sur l'apparente contradiction dans le Michné Torah (réponse qui renforcera ma lecture du Guide). Je précise tout d'abord que je n'ai pu lire aucun des commentateurs du Rambam sur la question et que ce que j'écris n'est du qu'à ma lecture des mots du Rambam dans le Mishné Torah (livre qui, fort heureusement, est présent dans ma base militaire, bien qu'en édition brute et sans commentaires). J'ai essayé d'étudier ces textes avec la méthode apprise de mes maitres, en faisant très attention à chaque mot du Rambam.

Ainsi, le Rambam écrit dans les lois de Chehita (10, 13) :

וכן אלו שמנו ואמרו שהן טריפה--אף על פי שייראה בדרכי הרפואה שבידינו שמקצתן אינן ממיתין, ואפשר שתחיה מהן:  אין לך אלא מה שמנו חכמים, שנאמר "על פי התורה אשר יורוך" (דברים יז,יא).

Que pomme a traduit : "Les blessures que nos sages ont répertoriés comme étant mortelles, même si nous constatons d'après la médecine qui se pratique de nos jours que certaines d'entre elles ne le sont pas, et qu'il est possible d'y survivre, on ne prendra en considération que ce que nos sages ont énuméré, comme il est dit (Deut. XVII, 11) Tu agiras d'après la Torah qu'ils t'indiqueront."

Selon cette lecture, le Rambam semble dire que même s'il est certifié qu'une bête est viable, elle est interdite si les sages l'ont classé dans les treifot. Cela semble contredire ce qu'il écrit dans les lois de maakhalot assourot (4, 7) ou la définition de treifa semble simplement être « animal non viable ».

Pourtant, un hébraïsant se rendra compte que la traduction de pomme n'est pas précise. Il traduit ואפשר שתחיה מהן par «  il est possible d'y survivre » . Une telle traduction affirme une certitude : cette bête survivra. Il me semble que la traduction exacte soit : « il est possible qu'elle y survive », ce qui signifie que cette bête a des chances de survivre mais que rien n'est sur !! Si la traduction de pomme était exacte, le Rambam aurait du écrire ואפשר לחיות מהן...


Ainsi, tout s'arrange. Le Rambam dans le Guide affirme qu'on ne suit pas les sages lorsque la science prouve qu'ils se trompent. Évidemment, il faut que la preuve soit absolue. Comme il l'écrit lui même (Guide, III, 14 fin) : « l'homme d'un caractère noble et qui aime à être juste doit toujours tenir, autant que possible, à interpréter les paroles des autres (chez nous, les sages) de manières à les mettre d'accord avec ce qui a été démontré des hautes vérités de l'être ».
Tant qu'il existe une possibilité d'interpréter alors nous interprétons les paroles des sages afin de les mettre en accord avec les vérités scientifiques. Lorsque nous sommes face à un dilemme sans issue, alors nous choisissons la vérité. Dans les lois de Chehita, le Rambam admet que la science de son époque permet de sauver des animaux condamnés par les sages, cependant, il note que cela n'est pas absolu. « il est possible qu'elle (la bête) y survive », en l'absence de certitude on s'en tient aux paroles des sages. Par contre, s'il était sur qu'il soit « possible d'y survivre » alors la bête serait permise !

J'espère vraiment n'avoir rien rater. Si cette explication tient la route, alors voilà une possibilité alternative à la compréhension du Hazon Ish. Possibilité qui n'est pas du tout ultra-conservatrice...

Je finis par les mots du Rambam dans Hilchot kidoush hakhodesh (17,24) qui sont extrêmement pertinent pour notre sujet et qui récapitule plus ou moins ma thèse :

ומאחר שכל אלו הדברים, בראיות ברורות הם, שאין בהם דופי, ואי אפשר לאדם להרהר אחריהם--אין חוששין למחבר, בין שחיברו אותם נביאים בין שחיברו אותם גויים:  שכל דבר שנתגלה טעמו, ונודעה אמיתתו בראיות שאין בהם דופי--אין סומכין על זה האיש שאמרו, או שלימדו; אלא על הראיה שנתגלתה, והטעם שנודע.

"et après que toutes ces choses aient été prouvées de façon absolue - sans laisser de doute et sans que quiconque puisse les remettre en question – on ne s'intéresse pas à l'auteur. Qu'elles soient écrites par les prophètes ou par les gentils. Car toute chose dont la raison est connue et dont la véracité a été établie par des preuves absolues, on ne s'intéresse pas à l'homme qui les a dit ou enseigné, mais à la preuve qui s'est dévoilée et à la raison qui s'est fait connaître. »


Voilà ce qui, selon moi, résume bien la pensée du Rambam. Une vérité est toujours acceptée, peut importe qui la dit, qu'il soit juif ou pas, prophète ou hérétique. Évidemment, avant cela il faut prouver cette vérité de façon à ne plus laisser le moindre doute. Puis, la vérité se dévoile d'elle même. L'auteur n'est devenu que l'intermédiaire qui a permis à la vérité d'apparaitre.


Encore une fois, j'appelle chacun à bien se pencher sur les textes et les arguments avant de répondre. N'oublions pas que le but n'est pas d'imposer notre vérité mais de réussir à découvrir LA vérité, celle qui existe par elle même.

Pomme me demandait aussi des sources rabbiniques soutenant une évolution de la Halakha. Une bonne dizaines de sources se bousculent dans ma tête, mais je tiens à les vérifier une à une pour éviter les erreurs. Je répondrais donc plus tard.


Chabbat Chalom à tous !
pomme
Messages: 76
@ Shmuel1

Désolé d'avoir dû vous faire patienter, mais vous l'avez compris, les vacances sont terminées.

J'ai bien lu votre message.
J'en reprends quelques passages, non pas pour le critiquer, mais pour essayer d'aiguiser la différence entre votre approche et la mienne.
La nuance est parfois très fine, mais ses conséquences sont loin d'être négligeables.
Je pense qu'au bout de la lecture de ce message vous saisirez mieux l'enjeu de cette différence d'orientation.

1) Vous écrivez :
"Si j'ai bien compris ce que vous dites, vous expliquez que la Bible n'est pas un livre d'histoire mais d'enseignements moraux, et que donc il peut y avoir des inexactitudes sur le plan historique. Je suis d'accord, mais cela va dans mon sens : si des preuves extérieures réelles (…), contredisent des données historiques dans la Bible, il suffit de répondre que, effectivement, la date donnée par la Bible n'est pas FACTUELLEMENT exacte, mais la date a été modifiée pour telle et telle raison morale/éthique. Ce qui fait que la Bible n'est pas une source sûre concernant les faits historiques, contrairement à la datation au carbone 14...

Non. Vous allez trop vite.
Je vous avais mis en garde, rappelez-vous :
"Mais attention, Shmuel1, ce fait n'ouvre en aucun cas "un précédent pour remettre en cause des passages bibliques contredits par des recherches archéologiques", comme vous l'écrivez. Tout dépend de l'intention de la bible à chaque endroit."

Précisons un peu plus les choses.
Je n'ai fait que dire qu'étant donné que la Bible est avant tout un livre d'enseignements, nous savons que "par endroits" ce qu'elle cherche, c'est à nous livrer certains enseignements, et que dans ce but elle n'hésite pas à employer des termes qui, dans un livre d'histoire, auraient été vraiment très mal placés.

Vous devez comprendre qu'il ne s'agit pas ici "d'inexactitudes sur le plan historique", comme vous le dites, mais plutôt "d'erreurs totales", et "volontaires".
Nous percevons alors deux restrictions pratiques :
Ce fait ne peut pas expliquer tout endroit où l'histoire biblique ne s'arrange pas avec la science. Là où il est évident que "l'intention" du message de la bible est d'exprimer une donnée historique, celle-ci doit nécessairement être vraie.
L'exemple le plus net est celui de la sortie d'Egypte. La Torah exprime clairement que le peuple hébreu était esclave en Egypte, et en est sorti sous le couvert de miracles. Elle nous demande de nous rappeler de cette période d'esclavage, ainsi que de la sortie, de commémorer cette sortie, etc.
Il n'est pas pensable qu'il ne se cache derrière tout cela qu'un simple enseignement, et aucun fait réel.

Seconde restriction, ce fait ne peut pas non plus être employé systématiquement pour reléguer toute donnée historique qui ne s'arrange pas avec la science, au monde des enseignements. Ce n'est pas au premier accrochage avec l'Histoire sur un sujet que nous allons décider que la Bible nous fait là encore un de ses "coups d'enseignement".

Ici il faut faire preuve du "bon sens" dont je parlais.

Il est absolument nécessaire de peser, d'un côté à quel point le passage biblique en question est-il susceptible d'enfermer un enseignement, ou au contraire à quel point semble-t-il plutôt relater un fait à fin historique. Et de l'autre côté, de bien sûr vérifier à quel point les données historiques sont-elles, ici, contraignantes. Ce n'est qu'après avoir fait la moyenne de tout cela qu'il devient possible de se faire une idée sur l'orientation à prendre.

Si vous le voulez, votre expression : " il suffit de répondre que ", ne me convient pas, même pas là où les données historiques paraissent solides.
Ce n'est pas parce que l'on dispose d'une "sortie de secours" qu'il faut systématiquement en faire usage.

Les endroits où la Bible peut s'amuser à écrire des termes historiquement faux pour faire passer un enseignement, doivent impérativement être extrêmement rares (et devraient normalement être signalés par les commentateurs). Sinon, s'il fallait craindre que sous chaque mot de la Bible se cache en fait un enseignement malin, le texte n'aurait plus aucun sens.
Ceci ne peut pas être le style biblique "standard".
Si c'était le cas, nous aurions dû recevoir en parallèle à la Bible un "mode d'emploi" précisant où croire quoi (comme ce que fait la Torah chébéal Peh avec ses drachot, là où la Torah chébikhtav est volontairement restée imprécise).

Donc, vouloir utiliser ce phénomène pour se mesurer aux contradictions entre la Bible et les sciences, correspond à concevoir la Bible comme un livre sans véritable colonne vertébrale, ce que je refuse.
Dans la pratique on n'utilisera à mon avis cette issue que "très très" rarement.

2) Vous écrivez :
"Je précise ma pensée : il existe, dans chaque prophétie, fond et forme. (…) Le fond est éternel, véritable (…). Cependant, la forme, l'habillement de la prophétie, est une parabole qui a été choisie en fonction de l'auditoire pour part, et aussi en fonction de la connaissance du prophète. Hashem ne cherche pas à remettre en cause ces connaissances subjectives qu'a le prophète, et que celui croit être vraies (à tort ou à raison). Ces "croyances" sont donc intégrées dans la prophétie. (…) Il n'y a donc pas lieu de voire des contradictions entre la science et la Torah. La Torah ne voit pas dans les connaissances scientifiques un dogme, et laisse le champ libre à ce sujet. "

Plus loin vous vous demandez au sujet de ma conception des choses :
" que se passerait-il s'il était prouvé, strictement, sans aucun doute possible, qu'une donnée dite scientifique dans la Torah, SE TROMPE (…) vous ne pouvez pas PROUVER que cela n'arrivera jamais. "

Avec votre permission, je vous renvoie la balle.

Même après que vous ayez, à la suite du Ralbag, posé une distinction entre forme et fond, votre question continue à retentir :
" que se passerait-il s'il était prouvé, strictement, sans aucun doute possible, qu'une donnée dite scientifique dans "le fond du message" de la Torah, SE TROMPE (…) vous ne pouvez pas PROUVER que cela n'arrivera jamais. "

En effet, si l'erreur scientifique décelée touche au fond même du message prophétique, et qu'il ne peut s'agir d'une "croyance" de la part du prophète, mais d'un fait réel auquel il prétend avoir assisté (le Nil transformé en sang, par exemple), vous êtes bien obligé d'accepter qu'il y aurait problème.

Vous dites que " La Torah ne voit pas dans les connaissances scientifiques un dogme". Comprenez que ce que vous qualifiez de "connaissances scientifiques" est censé quelque part représenter "la réalité". Or si la Torah s'exprime envers la réalité, il y a nécessairement problème. Dogme ou pas dogme.

Pas que je cherche à fuir votre question, j'y reviens plus loin, mais je tiens juste à vous faire remarquer que le Ralbag ne nous avance pas beaucoup. Au mieux il nous aura fourni une "échappatoire" de plus, et repoussé le problème un peu plus loin. Mais où qu'on le place, il subsiste.

3) Vous écrivez :
"Mais je n'ai pas d'opposition idéologique à, finalement, remettre en cause l'exactitude de certains faits dans la Bible."

Vous ajoutez encore :
" Vous pouvez retomber sur vos pieds à l'aide de votre thèse générale sur l'exactitude de la prophétie, mais vous n'avez rien réglé : c'est précisément cette thèse qui est en discussion. Cela devient juste une idéologie, hors du domaine de la logique. "

Comprenons-nous un peu mieux.
Il ne s'agit pas ici "d'opposition idéologique à remettre en cause l'exactitude de certains faits dans la Bible", ou pas.
Avez-vous une "opposition idéologique à remettre en cause l'exactitude de certains faits dans les sciences" ?

La question est : dans quelle mesure votre propension à remettre en cause certains faits bibliques est-elle égalée par votre propension à le faire pour certains faits scientifiques ?
Ou en d'autres mots : voyez-vous, au fond de vous-même, une plus grande aptitude à faire confiance à la science ou bien à la Torah ?

Je dis bien "faire confiance", parce que ce n'est que très rarement que la science peut être perçue comme vérité incontournable. J'ai déjà donné (dans mon dernier message daté du premier mai) quelques exemples de "vérités" scientifiques universelles, qui se sont effondrées comme des châteaux de cartes.
Mais attention comprenez-moi bien. Je suis très loin de vouloir dire que "la science c'est du n'importe quoi". Ce n'est pas du tout le sens de mon discours.
Pleinement conscient de la juste valeur de celle-ci, je refuse seulement d'en faire un synonyme de "vérité".
Et, parallèlement à cela, je cherche à prendre aussi conscience de la juste valeur de la Torah.
Pour le croyant la prophétie est la parole divine.
(A titre strictement personnel, je considère que la véracité de la prophétie de Moïse est philosophiquement démontrable. Mais je n'ai aucunement l'intention d'aborder ce sujet dans ce forum. Je fais donc ici simplement appel à la foi.)
Nous sommes bien d'accord que la foi juive affirme que la prophétie est la parole de D.ieu à l'homme. Que refuser cette idée égale à refuser l'ensemble du judaïsme. Et que cette parole ne peut en aucun cas se baser sur une erreur comise par D.ieu.

A présent regardez bien.

La différence entre mon approche et la vôtre est la suivante. Moi je "crois" que la prophétie est vraie, et je "crois" que la science est vraie. Donc, quand je tombe sur une contradiction entre les deux, Je me penche dessus comme lorsque je tombe sur une contradiction entre deux faits scientifiques, ou bien sur une contradiction entre deux parties de la Torah. Aucun des deux ne prévaut. Toutes mes croyances sont remises en question. Je cherche donc une solution dictée par le bon sens.

Vous, vous "croyez" que la science est vraie, et vous "espérez" que la Torah l'est aussi. Alors même si dans l'absolu vous pouvez avoir le sentiment que votre position est plus juste que la mienne. Mais il demeure qu'au moment où vous devrez confronter les deux, la Torah est d'emblée désavantagée, et votre conclusion en est pour autant faussée.

Vous dites à propos de la prophétie : "c'est précisément cette thèse qui est en discussion."
Non.
On peut en effet discuter de la véracité de la prophétie. Mais pas au moment où vous cherchez à déterminer si telle ou telle preuve archéologique ou autre est suffisante pour repousser tel ou tel passage biblique.

Si à l'avance la Torah est pour vous une simple hypothèse, et la science une réalité, alors sincèrement, ne perdez pas votre temps à les comparer. Utilisez plutôt votre temps pour apprendre quelques connaissances scientifiques de plus, elles vous seront beaucoup plus utiles.

En résumé, comprenez que le simple fait d'établir une "liste de sources traditionnelles" où l'on voit qu'il arrive que la Torah se trompe au niveau scientifique, vous éloigne totalement de mon approche du problème, parce que "ce retrait de la bataille est le début de la défaite et reflète un manque de foi", pour reprendre les termes du rav Soloveitchik, dans un sens bien sûr différent.

Voilà Shmuel1, j'espère avoir été suffisamment clair. Encore une fois je ne cherche absolument pas à vous critiquer, mais à bien appuyer sur la grande différence d'orientation qui sépare nos deux approches.
Si ce que j'ai écris-là ne vous suffit pas, reportez-vous au mot que j'espère pouvoir écrire à M.O. dès que j'en trouverais le temps.

Pour ce qui est de la question du "rakia", je n'y vois pas trop de problème puisque nous n'avons pas fini d'observer la totalité du cosmos.
Mais si réellement il y avait question, je ne m'opposerais pas à voir dans ce passage précis une allusion à certaines notions cabalistiques, relatives aux sfirot, puisque des enseignements dans le Zohar vont dans ce sens.

Ce qui me dérange, vous l'avez compris, c'est que cela soit une Chita lé'hat'hila.

Chabbat Chalom.
pomme
Messages: 76
@ RYG

1) Vous écrivez :
"A propos d’un développement sur yom tov shéni shel galouyot, le Meshekh Hokhma rapporte une célèbre citation du Gaon de Vilna voulant que chaque guezéra ou takana prise par ‘Hazal pour un motif déterminé dans le Shass cache en fait d’autres motifs plus profonds que nous ne connaissons pas (Parasha Bo, s. v. « HaHodesh Hazé Lakhem »). Le Gra se montre donc très conservateur et refuse ainsi toute la littérature des Rishonim considérant que même une guezéra prise béminyan s’annule d’elle-même dès que sa raison disparaît (Méiri sur Betsa 5a, voir également le Rosh « shout harosh » klal bét, séif ‘het, et une discussion à ce sujet dans ‘Hazon Ovadia 3, p. 358 « dinéi holé shéin bo sakana »)."

Merci pour ces précieuses références.

2) Vous écrivez :
"Cependant, le problème de cette classification est qu’elle reste assez arbitraire. Comment distinguer dans le Shass l’origine des propos des Sages ? Comment discerner s’ils basent leurs propos sur les connaissances scientifiques de l’époque ou sur une tradition remontant aux prophètes ?"

Vous avez tout à fait raison. Pour y parvenir il faut une grande békiout, et un certain flair. C'est pourquoi dans ce domaine nous faisons en général plus confiance aux grands maitres qu'à notre propre entendement.

Le rav Dessler que j'avais cité à propos des poux, a par exemple su fixer que la hala'ha permettant de les tuer le jour du Chabbat remontait aux générations précédentes, tandis que la raison donnée par le talmud, elle non. Ceci n'est pas donné à tout le monde.

3) Il s'agit du targoum Yonathan ben Ouziel sur bamidbar XIX, 3 (ou 4 je ne me rappelle plus exactement).
Mais si vous voulez une référence encore plus explicite, il y a la Gmara dans 'Houlin 42a en bas : " Elou chmona essreh treifot chnéémrou lo lémoché misinaï ".

4) Je ne possède pas les Igrot 'Hazon ish. J'avais dû pour les consulter les chercher dans un Beit hamidrach. Si j'ai l'occasion j'essayerai de les retrouver pour vous scanner le passage en question.
En tout cas petite précision, au cas où vous vous les procuriez en attendant, il s'agit non pas de la page 206, mais de la Lettre n° 206.

Chabbat Chalom à tous.
pomme
Messages: 76
@ M.O. [et suite de ma réponse à Shmouel]

Chavoua Tov,

1) Pas facile de gérer une contradiction entre deux Rambam à partir d'une base militaire, en utilisant une édition sans le moindre commentaire !

En fait en lisant le Kessef Michné on se rend tout de suite compte que son interprétation du Rambam correspond à celle du 'Hazon ish, puisqu'il écrit que "le Rachba dans ses Téchouvot (I, 98) a écrit pareillement que le Rambam".
Or sur l'intention du Rachba dans ladite Téchouva, il ne peut y avoir aucun doute, il est extrêmement explicite, et son approche se trouve à 500 années lumières de l'approche "Modern orthodox".

Sinon, l'interprétation visant à dire que le Rambam ne parle que de cas où la médecine est indécise, ou imprécise sur l'état de viabilité de l'animal, et où elle ne fait que dire qu'il peut "parfois" survivre à sa blessure, n'arrange pas le problème.
La treifa est en effet clairement définie comme étant l'animal non-viable, dans le sens où il lui est "impossible" de survivre à sa blessure. Si la médecine lui donne des chances, même si elle ne lui garantit pas la survie, cela aurait dû être suffisant pour qu'elle ne soit plus considérée treifa.

Je pense donc que le Rambam ne peut se comprendre qu'à la façon du Kessef michné et du 'Hazon ish.

2) Le Rambam dans le moreh Nevou'him est très clair.
Qu'en le lisant on comprenne que :
" si la tradition venait effectivement des prophètes, on se serait attendu à ce que leurs paroles fussent effectivement en accord avec la réalité."

Ou bien que :
" Si ces paroles puisaient leurs sources chez les prophètes alors cela signifierait qu'effectivement la tradition est fausse (sic) et que la Torah n'est pas divine (SIC) !"

Revient absolument au même, puisque nous sommes bien d'accord que, pour le Rambam repousser une prophétie à l'aide d'une preuve scientifique, en reviens à repousser tout le judaïsme à l'aide de cette preuve.

La question n'est donc pas sur l'interprétation des dires du Rambam, mais sur les conséquences de sa sentence.

Dans l'absolu total vous avez tout à fait raison ; Si on en venait à conclure que la prophétie ne correspond pas à la réalité, alors cela signifierait que celle-ci n'est pas d'origine divine.
Par contre dans la pratique en ce qui concerne une contradiction Science-Torah, les proportions diffèrent, au point de changer la conclusion. Premièrement "Science" n'est pas synonyme de "réalité". Et deuxièmement la prophétie ne repose pas sur "rien du tout". La torah n'est pas un petit fascicule que l'on aurait trouvé abandonné sur le quai du métro, pour que l'on se plaise à la discréditer au premier passage inexpliqué.

C'est pourquoi j'écris "on se serait attendu à ce que leurs paroles fussent effectivement en accord avec la réalité", et pas "sinon la Torah n'est pas divine", bien que les deux reviennent tout à fait au même.

C'est tout le rapport entre la Science et la Torah qu'il faut revoir.

Pour moi, comme je l'ai déjà assez répété, je crois fermement en la science, mais refuse d'y voir un synonyme de vérité. Parallèlement je crois fermement en la prophétie.
Face à une contradiction entre les deux, ma réaction égale à ma propre réaction lorsque je tombe sur une contradiction entre deux conclusions scientifiques indépendantes. Je prends conscience du problème et ne cherche d'abord qu'à réconcilier les deux. Si cela s'avère impossible, je pèse et soupèse jusqu'à découvrir où peut bien se cacher l'erreur.

S'il n'y a aucune issue, et seulement à ce moment-là, je vérifie s'il est possible de voir en la parole prophétique en question une allégorie à prendre au sens figuré, et pas au sens propre.

Si cela parait également impossible, alors je supposerai que la science fait erreur.

Pourquoi la science et pas la Torah ?

a) Parce que je suis croyant.
b) (Que je rajoute pour ceux qui ne le sont pas suffisamment…) Parce que cette croyance repose sur des bases qui n'ont rien à envier à celles sur lesquelles reposent les différentes sciences.

Qu'est-ce qu'une science ?
Un mode d'appréhension de la réalité auquel l'expérience a conféré un aspect sérieux et fiable. Une méthode qui donne plus de réponses qu'elle ne génère de questions.
Rien de plus.

Qu'est-ce que la Torah (pour celui qui l'a étudiée suffisamment) ?
Un mode d'appréhension de la réalité auquel l'examen interne a conféré un aspect sérieux et fiable. Une révélation qui a donné plus de réponses qu'elle ne génère de questions.

Bon, alors pourquoi aurais-je plus confiance en la Torah qu'en les sciences. Les deux sont au mieux à égalité ?

Il existe une différence. Pas à notre niveau, mais à celui du prophète lui-même. Le prophète affirme que ce qu'il nous transmet est la parole divine. Dans ce cas il ne s'agit plus uniquement d'un "aspect sérieux et fiable", mais de La vérité même. Ce qui fait que d'un côté ce que la science affirme c'est de posséder un très fort degré de fiabilité, tandis que ce que le prophète affirme c'est de posséder La vérité.
Si les deux ont raison, alors c'est nécessairement le prophète qui l'emporte.

Donc le prophète lui-même accordera confiance à sa propre prophétie plus qu'à la science. Tandis que nous, nous nous contenterons de "supposer" que la science fait ici erreur.
Car avant de repousser l'ensemble du judaïsme, il nous faudrait y déceler "plus de questions que ce qu'il nous fournit de réponses" au point de lui ôter son aspect sérieux et fiable. Ce qui n'est pas le cas lorsque nous ne nous retrouvons qu'en face d'un ou deux problèmes.

Je pense très sincèrement que le Rambam ne voyait pas les choses différemment de ce que je viens d'écrire.

3) Je finis sur une touche d'humour, vous écrivez :
" Une vérité est toujours acceptée, peut importe qui la dit, qu'il soit juif ou pas, prophète ou hérétique."

Le "hic" avec cette affirmation, c'est quand la vérité a le malheur de sortir de la bouche d'un 'haredi :D

A la prochaine.
Modern Orthodox
Messages: 43
@ Pomme

Effectivement, l'absence de livres réduit les possibilités de compréhension...

1) Heureusement, je suis enfin sortie de ma base et j'ai pu lire les sources en questions. Notamment la shout du Rashba (I, 98). La lecture de cette shout m'a rappelé que j'étais fort loin de maitriser les hilchot treifa...
Cependant, cette lecture, ainsi que celle des différents commentateurs du Rambam, a également mis en valeur le nombre de points qu'il faut éclaircir pour comprendre l'avis du Rambam. Je trouve fort mal aviser d'affirmer que le kessef miché pense comme le Hazon Ish lorsqu'on se rend compte que le Rashba utilise des dizaines de guemarot pour expliquer son point de vue alors que le Hazon Ish se contente d'une Haggada peu hilchatite.

Au passage, un rapide tour d'horizon m'a aussi laissé entrevoir d'autres réponses possible à cette contradiction dans le Rambam, réponses plus halakhiques que celle du Hazon Ish. Je vous conseille notamment de lire les avis des différents commentateurs disponibles sur hebrewbooks (http://www.hebrewbooks.org/rambam.aspx?mfid=13311&rid=4631). Je ne relance pas ce sujet car je ne le maitrise pas assez, je cherche juste à montrer que l'avis du Hazon Ish est loin d'être le seul et encore plus loin d'être le plus évident (la shout du rashba en est une preuve très claire, lisez la bien). J'espère pouvoir consulter bientôt les commentaires du Rav Yossef Kapach et du Rav Nachum Rabinowitz, dans l'espoir d'y trouver un peu plus d'éclaircissement. Si tel est le cas, je vous le ferais savoir.


2)Il y a une énorme différence entre votre lecture du Morei Nevoukhim et la mienne...

Je vais la formuler ainsi : que serait-il arrivé si le Rambam serait arrivé à la conclusion que certains des 13 yikarim ne peuvent être vrai? Cette question est bien évidemment théorique car le Rambam estimait qu'une telle chose était impossible. Cependant, poussons l'honnêteté intellectuelle jusqu'au bout et imaginions que demain on nous amène la preuve irréfutable (si tenté est qu'il existe des preuves irréfutables sur terre) que le texte de la Torah que nous connaissons n'est pas exactement le texte que Moché a reçu au Sinai (par ex.). On connait tous l'article de foi de Maimonide qui précise bien que chaque verset de la Torah est d'origine divine. Supposons qu'on se rende compte que le texte samaritain soit plus exacte (il existe quelques différences). Selon vous, on choisira la Torah. Selon moi, on ne choisira pas la science mais la vérité. Je pense que pour le Rambam la vérité prime avant tout. Évidemment, jusqu'à preuve du contraire, rien n'est plus vrai que la torah donc en pratique nous sommes d'accord. Mais la théorie n'est pas rien...

Je pense que pour le Rambam, l'opposition science/torah n'existe pas. Dans sa philosophie, seule la vérité prime. La Torah n'a de valeur que parce qu'elle est vérité. La science est la recherche de la vérité, par conséquent elle a une valeur considérable. Dans un recueil de lettre posthume du Rav Yossef Kapach (Rav contemporain d'origine yéménite qui était extrêmement baki dans le Rambam. Il est l'auteur d'une édition très medouyeket du Yad ainsi que de la traduction hébraïque du Morei Nevoukhim publiait au Mossad Harav Kook) le Rav répondait à quelqu'un qui lui demandait s'il valait mieux apprendre du Hol et du Kodesh aux enfants ou uniquement du Kodesh.
Rav Kapach s'étonnait de cette expression de « Hol » (profane) pour désignait les sciences ! En quoi les sciences seraient-elles des matières « profanes », écrivait-il ? Dans l'esprit du Rambam, Rav Kapach soutenait que les sciences devaient être étudié au même titre que la Torah et que ces deux éléments ne formaient en fait que le même moyen permettant à l'homme d'arriver à la connaissance du vrai, donc de Dieu.


3)J'avais promis de vous fournir des exemples témoignant d'une « évolution de la Halakha » à travers les époques. Comme dis, j'ai en tête beaucoup d'exemple. Après réflexion, j'ai jugé bon de n'en ramener que un, si cela ne vous suffit pas, faite le moi savoir.

Mon exemple provient du Meiri. Comme vous le savez sans doute, il existe dans la Torah et la guemara deux catégories de non-juifs : les « bnei Noah' » qui respectent les lois noahides, et les autres (qu'on désigne géneralement par Akoum, ou idolatres). Ces catégories ont une multitude de conséquence sur la Halakha. Ainsi, seul celui qui respecte les lois noahides peut obtenir le statut de « guer toshav » et posséder des droits civiques en pays hébreu. Il n'existe formellement pas d'interdit à voler un idolâtre (cependant, on ne le fera pas « mishoum darkei shalom »), on n'a pas besoin de lui rembourser les dégâts qu'on lui cause, il ne peut vivre en Israël, on ne profane pas le Shabbat pour le sauver, on ne le marie pas, on ne fait pas de commerce avec eux avant leurs jours de fêtes, etc...

Apriori, le monde chrétien appartient à la catégorie des idolâtres. En effet, il ne respecte pas l'ensemble des lois noahides et son monothéisme est plus que douteux. D'un autre coté, il est dur d'assimiler la religion chretienne aux différents paganismes de l'époque biblique et talmudique ! Les peuples idolatres décrient par la Bible servent une ribambelle de statues et pratiques même souvent des sacrifices humains ! Chez le chrétiens, on croit en un Dieu unique même si celui peut prendre différentes formes corporelles.

A la lueur de ce problème, le Meiri décide de créer une nouvelle catégorie de non-juifs : « hakdourim bedarkei hadat », qu'on pourrait traduire par les personnes « restreintes par les voies de la religion ». Cette catégorie nouvelle accorde au chrétien un statut bien plus élevé que celui du traditionnel idolâtre. Le Meiri utilise cette catégorie à de nombreuses reprises, ce qui a d'ailleurs donné lieu à de très nombreuses études sur son approche du christianisme. Regardez par exemple ici http://www.hebrewbooks.org/pdfpager.aspx?req=40773&st=&pgnum=325&h (en bas de la page). Je vous conseille aussi ce bon article (en anglais) : http://www.edah.org/backend/coldfusion/search/document.cfm?title=%27Ones%20Possessed%20of%20Religion%27%3A%20Religious%20Tolerance%20in%20the%20Teachings%20of%20the%20Me%C2%92iri&hyperlink=Ones_Possessed_of_Religion.html&type=JournalArticle&category=Jews%20and%20Gentiles%3A%20%C2%93Other%C2%94%20in%20Modern%20Orthodox%20Thought&authortitle=Dr.&firstname=Moshe&lastname=Halbertal&pubsource=The%20Edah%20Journal%20Volume%201%3A1&authorid=511&pdfattachment=halbertal.pdf


Kol Touv
pomme
Messages: 76
@ M.O.

Comme je pense ne pas pouvoir trouver d'ici la fin de cette semaine plus de temps que ce dont je dispose aujourd'hui, j'écris une petite réponse à la vas-vite histoire de faire avancer les choses. Si nécessaire je la complèterai plus tard.

Je reprends vos points un à un.

1a) Je ne voulais pas du tout dire que le Kessef mishné pensait comme le 'Hazon ish quant à sa façon d'expliquer les "motifs" du Rambam, mais juste remarquer qu'il comprenait la hala'ha du Rambam comme le 'Hazon ish la comprend, et non pas comme vous vouliez l'expliquer dans votre dernier message.
Les motifs du Rambam eux peuvent bien sûr être divers, bien qu'il ne faille oublier que lui-même justifie sa hala'ha en citant un verset qui n'est pas anodin.

1b) De manière générale le 'Hazon ish ne cite qu'un minimum de références dans ses écrits, c'est son style lorsqu'il présente un sujet, cela ne signifie pas que sa pensée ne s'appuie que sur ce qu'il cite, mais c'est une façon pour lui d'insister sur le côté contraignant et incontournable qu'il trouve au peu de références qu'il choisit de citer.

2) Je suis entièrement d'accord avec ce que vous présentez être votre avis. C'est le mien aussi.
Je n'arrive pas à cerner ce qui vous fait croire le contraire.
Mon "opposition", si on peut la qualifier ainsi, est juste quand je vous entends dire, comme dans votre message précédent à propos du passage dans le Moreh Nevou'him que :
"Il est absurde de penser que le Rambam, qui établit la vérité comme élément le plus parfait (…) puisse dire que si la vérité contredit la Torah alors c'est la Torah qui a raison !"
Phrase qui laisse entendre que la science serait pour vous nécessairement synonyme de "vérité".
Mais quand je vous lis cette fois-ci :
"La Torah n'a de valeur que parce qu'elle est vérité. La science est la recherche de la vérité, par conséquent elle a une valeur considérable."
Ou bien :
"imaginions que demain on nous amène la preuve irréfutable (si tenté est qu'il existe des preuves irréfutables sur terre) que le texte de la Torah que nous connaissons n'est pas exactement le texte que Moché a reçu au Sinai (…) Selon moi, on ne choisira pas la science mais la vérité."

Je suis entièrement d'accord avec vous et répond "Amen" à chaque phrase.

Je vous invite par conséquent à relire tout ce que j'ai écrit sur le sujet ;
de mon côté j'essayerai aussi de vous relire pour voir ce qui peut "clocher" et que j'aurais raté. Mais en tout cas après avoir lu trois fois votre message, je me trouve entièrement d'accord avec la position que vous présentez là.

3) L'exemple est très bien choisit, je vous en tire mon chapeau !
Je n'ai pour le moment pas le temps de me pencher dessus, ou d'aller vérifier les articles en ligne que vous signalez, mais de mémoire je vois tout à fait de quoi il s'agit, et cela me donne une bonne base pour commencer à comprendre à quoi vous pensez lorsque vous parlez "d'évolution dans la hala'ha".

Si vous disposez d'autres exemples cela pourrait m'aider à encore mieux saisir votre esprit, sinon ce n'est pas grave.

Par contre j'ai besoin avant de pouvoir réagir de comprendre ce que ce Méïri (ou autres éventuelles sources) vous inspire.
Quel exemple d'évolution pensez-vous pouvoir en déduire ?

A+
Modern Orthodox
Messages: 43
@ pomme

Tout d'abord, laissez moi vous dire mon plaisir à poursuivre cette discussion avec vous. Malheureusement, il arrive fréquemment que ce genre de discussion se transforme rapidement en polémique vide. Je suis heureux de voir que ce n'est pas le cas avec vous. Je sens une vraie écoute de votre part, sachez qu'elle est réciproque.

Il est intéressant de remarquer qu'après ce long échange, nos points de vue se sont peu à peu rapprochés alors qu'ils semblaient bien loin de l'autre, au début...

Je n'ai pas beaucoup de temps pour répondre en détail à votre dernier message. Ne vous pressez pas pour me répondre, je ne serai certainement plus disponible jusqu'en fin de semaine prochaine.

Par rapport au Meiri et à l'évolution de la Halakha, j'ai deux points à exprimer. Ils vous permettront peut être de mieux comprendre ma pensée sur ce sujet.

Je pense qu'une évolution de la Halakha est nécessaire dans de cas principaux :

a) en cas d'erreur
b) en cas de changement

a) Le premier point, je crois, est plus facile à comprendre. Particulièrement après notre discussion sur la science. Certaines halakhot reposent sur des erreurs. Le cas des poux (qu'on pourraient tuer le chabbat) est revenu plusieurs fois, je pense qu'il faut rajouter d'autres points. Par exemple, les mélanges poissons/lait et poisson/viande. Bien evidemment, chacun est libre de manger ce qu'il veut, mais je pense qu'il faut arrêter d'affirmer que ces mélanges sont interdits, lorsqu'on sait qu'il s'agit de conseils medicaux de la guemara (et encore, poisson/lait n'y est même pas mentionné) dont il a été prouvé qu'il n'en est rien. Nous avons également parlé de l'approche du Rambam et de son fils sur les conseils médicaux des sages...
Un autre exemple serait celui du "kazayit" qui, au cours des générations, est passé de la taille d'une olive à la taille d'un gros œuf ! Une des raisons principales et l'affirmation du noda biyehouda (tzlach sur pessachim 120a) selon laquelle les "oeufs" de l'époque talmudique étaient deux fois plus grands...
Évidemment, il existe une très longue listes de preuves qui montrent sans ambigüité que les œufs n'étaient certainement pas plus grand mais plus petit et que les olives n'ont pas changé de taille...
Aujourd'hui on est arrivé à des absurdités assez énormes. A pessach nous mangeons 1/3 de matsa pour prendre un kazayit (et encore, pas selon l'opinion du Hazon Ish...), alors qu'un kazayit correspondrait plutôt à une petite boite d'allumettes ! Voilà encore une erreur commune qui a d'ailleurs de nombreuses conséquences sur la Halakha (le shiour pour dire le birkat hamazon, pour se rendre quitte de la matsa...). A noter cependant que certains acharonim considéraient qu'un kazayit a bien la taille d'une olive, pour une raison que j'ignore il s'agit d'un avis qu'on entend quasiment jamais. Voyez par exemple le Kehilat Yaacov sur Pessachim 38a qui ramène l'opinion du nefesh hachayim.


b) le deuxième point, celui du changement, est plus complexe. Les époques évoluant, nous sommes de plus ne plus confrontés à des situations (particulièrement sociales) qui n'existaient pas à l'époque talmudique. J'ai rappelé le cas des chretiens, qui ne sont ni les païens ni les bnei noach décrient par le talmud. Pour résoudre ce problème, le Meiri a eu le courage de créer une nouvelle catégorie de non-juifs.
Un autre cas, est bien évidemment la place de la femme juive. On pourra continuer les discours apologétiques indéfiniment, toute personne érudite connait la vérité : la femme est présenté dans le Talmud comme possédant une place bien secondaire (je vous renvoi aux post d'Emmanuel Bloch sur le Blog).
Une liste de raisons sociales permettent de justifier cette position. Mais ces raisons sociales n'existent plus.
Un troisième point est lié à l'état d’Israël. Qu'on soit sioniste ou pas, force est de constater qu'avec la création de l'état nous vivons dans une configuration totalement différente de celle du Talmud est des 2000 ans d'exil qui ont suivi. Une liste de nouveaux problèmes halakhiques découlent de cette situation (l'état a t-il un din de meloukha ? quel est le din des tribunaux laïques ? Sommes nous obligés de suivre les lois du pays...).


Voici des pistes éparpillées rapidement et qui demandent plus longues explications...

Kol Touv
pomme
Messages: 76
@ M.O.

Voyant la diversité de vos "pistes éparpillées rapidement et qui demandent plus longues explications" je n'ai pas voulu me pencher sur chaque cas pour le traiter dans les détails, comme il se doit. Je craignais qu'une réponse dans ce genre dégénère en avalanche. J'ai donc préféré me cantonner pour le moment aux grandes lignes ; si nous parvenons à nous y entendre il sera plus facile de traiter ensuite, si vous le désirez, des détails. Ou peut-être même que cela ne sera plus nécessaire…

Vous avez classifié les raisons qui d'après vous justifieraient que l'on fasse évoluer la hala'ha, en deux groupes que vous avez qualifié "les cas d'erreur" et "les cas de changement". Je pense pour ma part qu'il faut diviser les cas de changements en deux catégories distinctes : les situations nouvelles, et les cas où une reconfiguration de la hala'ha est nécessaire.

1) Par "situations nouvelles" j'entends par exemple le cas du Méïri ou de l'Etat d'Israël, où en fait ce n'est pas que hala'ha doive changer en quoi que ce soit, mais tout simplement qu'il nous faille faire face, avec les principes hérités de la hala'ha, à un cas de figure jusque-là inexistant.
C'est également le cas de la mort cérébrale dont nous avions parlé plus haut.

L'astuce dans ces cas c'est de savoir prendre conscience du fait que le problème qui se pose à nous ne se rattache pas aux cas déjà connus et présentés par la hala'ha. Et donc de ne pas "tomber dans le panneau" en l'assimilant à une hala'ha qui ne lui sied pas.
La partie innovante dans l'approche du Méïri par exemple repose en ce qu'il a su clairement fixer que le cas dont il traite est bel et bien d'un cas de figure absent du Talmud, et inassimilable à ceux qui y sont présent. Cette idée n'était pas évidente pour les Tossafot, qui avaient par conséquent grand mal à trouver un sens à nombreuses sentences talmudiques, comme le Méïri lui-même le souligne :
"J'ai souvent répété cette idée, qui nous évite tous les embarras explicatifs dans lesquels les commentateurs et les Tossafot se sont inutilement engagés." (Méïri avoda zara 22a)

On ne peut ici proprement parler de "changement dans la hala'ha". Il s'agit plutôt de la fixation du statut de "nouveaux cas", absents de la hala'ha.

2) Par "cas où une reconfiguration de la hala'ha est nécessaire" je pense aux endroits où constatant l'évolution des réalités, les rabbins ont senti la nécessité de réajuster les sentences hala'hiques en fonction de cette évolution.

Prenons par exemple le cas d'un couple qui n'a pas eu d'enfants. La hala'ha prévoit que, dans cette triste circonstance, après dix années de mariage, le couple divorce, afin de pouvoir donner (au mari) une chance d'accomplir son "obligation d'avoir des enfants", avec quelqu'un d'autre.

Cette hala'ha clairement tranchée, n'est pourtant aujourd'hui plus du tout respectée. Le 'Hazon ish lui-même était dans ce cas, ainsi que d'autres rabbins (je pense notamment au rav Issakhar Méïr récemment décédé). Aucun d'entre eux n'a divorcé.
On raconte que quand on interrogea le 'Hazon ish sur la raison pour laquelle il ne suivait pas ici la "hala'ha", il invoqua les conséquences psychologiques négatives que cette démarche risquait d'avoir sur son épouse.

Les données avaient en effet évolué. Un divorce il y a un ou deux millénaires (était rare mais) n'était pas la fin du monde. Aujourd'hui une personne qui se trouve forcée de divorcer après dix ans de mariage, alors que le couple s'entend bien, risque de sombrer dans un abattement duquel il (ou elle) ne sortira plus.
Alors, de même que la hala'ha nous dicte "d'avoir des enfants", elle nous dicte également "d'aimer notre prochain (et à bien plus forte raison notre conjoint) comme nous même". S'imposer le divorce dans notre cas, en reviendrait à piétiner grossièrement ce dernier précepte.
Il a fallu ici réévaluer la situation. Nos sages en sont arrivés à la conclusion que la réalité ayant changé, la hala'ha change avec.
Mais ce ne sont pas les principes de la hala'ha qui ont changé. L'obligation d'avoir des enfants reste la même. Mais l'évolution des états de fait a introduit de nouveaux éléments dans l'équation, qui ont entrainé que la sentence finale de la hala'ha ait changé dans tel cas précis.

C'est également une évolution au niveau des phénomènes psychiques qui a conduit avec le temps à une réévaluation de la situation et à une reconfiguration de la hala'ha, entrainant au bout du compte à l'interdiction de la polygamie dans le judaïsme. Voir http://www.techouvot.com/polygamie_et_misogynie-vt13256.html


Ici, bien qu'on ne puisse parler d'évolution des "principes" de la hala'ha, on constate tout de même une évolution des "sentences" hala'hiques.

3) Concernant "les cas d'erreur" dont vous parlez, je pense que le "problème" est double. Premièrement il faut être certain qu'il s'agit bien d'une erreur, et ne pas rebondir dès que quelque chose ne se plie pas gentiment à notre esprit.
Et deuxièmement il faut également être certain que la hala'ha qui nous semble reposer sur cette erreur, ne repose bien que sur elle, et pas sur d'autres raisons.

Les mélanges poisson-viande et poisson-lait, ainsi que les poux ou encore les treifot doivent être analysés chacun séparément à la lumière de ces deux idées. Il est impossible d'assimiler un cas à l'autre. Et il ne faut pas perdre de vue que notre objectif en tant qu'orthodoxes est de ne surtout pas en arriver à transgresser la volonté divine.

On peut donc éventuellement parler ici de "changement dans la hala'ha", mais dans la pratique les cas sont rares.

Le cas du Noda byehouda en est peut être un exemple.
Mais le problème du kazyt dépend à mon avis d'un tout autre diapason, celui de "l'ignorance". Le fait est qu'il est d'une part difficile, voire impossible, de définir définitivement ce qu'est un kazayt (même après avoir renoncé à l'avis du Noda Byehouda), et d'autre part il n'est pas moins difficile de demander aux gens de garder en tête toutes les données nécessaires pour fixer quelle quantité prendre en considération en fonction des situations.
C'est cette "embrouille" qui à mon avis entraine les dérives dont vous parlez.

Pour la petite histoire, je me suis rendu, à la demande d'un rabbin en France, avant Pessa'h de cette année, chez le rav Y.M. Shtern (du Beit horaa de rav Wozner) pour lui demander dans quelle mesure peut-on se fier à l'avis du Min'hat 'hinou'h (Mitsva 313) qui pense que Kédé a'hilat prass se calcule en fonction de l'aliment consommé (et pas d'après pat 'hittin), et donc pour allonger le temps de la consommation de la Matsa le soir du Seder. Sa réponse fut la suivante : "En réalité un kazayt c'est tout petit, on le mange sans problème kédé a'hilat prass, ce que les gens mangent "en plus", quelle importance si cela dépasse le temps ? Il n'est absolument pas nécessaire d'en arriver au Min'hat 'hinou'h."

On voit bien que pour ce rabbin l'avis du Noda byehouda, même pour une Mitsva déorayta, ne pèse pas très lourd, contrairement à ce qu'écrivais le Michna beroura, il y a un peu plus d'un siècle.

4) Mais, lorsque vous demandez à ce que, dans la tracée du Méïri, l'on revoie la place de la femme dans le judaïsme, je vous avoue que je ne vous suis plus. De quoi s'agit-il ?

Vous m'envoyez consulter à ce sujet les post d'Emmanuel Bloch sur votre Blog.

Après lecture je dois vous dire que si je devais rédiger une critique de ce post (http://modernorthodox.over-blog.com/article-etude-des-femmes-ii-la-femme-dans-la-halakha-par-emmanuel-bloch-73241643.html) nous n'en finirions plus, tellement je trouve à redire sur pratiquement tout. Mais comme je l'ai dit au départ, je préfère éviter les "avalanches". Et puis je ne sais pas à quel point une critique de son post "hors-blog" plairait à l'auteur.

Je me contente donc juste de vous demander à quoi pensez-vous donc ? Je ne vois aucun point qui fasse partie d'une des trois catégories suscitées (les situations nouvelles, la reconfiguration, et l'erreur), qui justifierait donc un changement.

Il y a bien dans cet article l'expression d'un sentiment d'infériorité au niveau de la quantité de Mitsvot, et de la prestance sociale (comme pourrait au même titre le manifester n'importe quel juif vis-à-vis du cohen). Mais puisque, comme Emmanuel Bloch l'a souligné avec franchise "dans toutes les familles juives orthodoxes de ma connaissance, la femme participe à toutes les décisions ayant trait à l'éducation des enfants. Et si une femme demande l'approbation de son mari avant de s'engager dans une grosse dépense, l'inverse arrive tout aussi fréquemment (…) je n'ai jamais rencontré de famille dans laquelle la maîtresse de maison n'était pas considérée, dans la conscience familiale partagée, comme une partenaire égale à son mari. Des rabbanim qui m'ont enseigné, j'ai reçu ce message constant: quelle que soit la situation, la femme passe en priorité. Et au-delà des discours, c'est l'exemple vivant que j'ai appris d'eux.", je ne vois donc pas ce qui pourrait justifier un changement au niveau de la hala'ha du type de ceux que nous avons cité plus haut.
Je ne vois pas non plus quelle hala'ha pourrait être visée.

Chavoua Tov
juif d'Israël
Messages: 73
@Pomme

Quand vous dites au sujet « des mélanges poisson-viande et poisson-lait, ainsi que les poux ou encore les treifot qu’on peut éventuellement parler de "changement dans la hala'ha" », vous voulez dire que vous êtes d’accord avec MO là-dessus ?
pomme
Messages: 76
@JDI

Je suis d'accord avec M.O. qu'il existe des cas d'erreur où il pourrait y avoir une évolution dans la hala'ha, comme dans l'exemple du Noda biyehouda que je cite juste après.
Mais je pense que ces cas sont rares. Donc, concernant tous les cas dont M.O. parle (poisson-viande, poux etc.) je pense qu'ils doivent être traité un à un, ce que je me suis refusé de faire dans mon message pour la raison que j'ai évoqué.

Layla tov.
Pat
Messages: 87
L'orthodoxie Moderne a-t-elle un avenir en France ?

Mais au fait, la France a-t-elle un avenir ? ...
La bonne humeur
Messages: 62
La France et l'orthodoxie moderne auront probablement le même type d'avenir :

un avenir, mais en dehors de l'Hexagone :D :D
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