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Rav Yossef Messas

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verna
Messages: 96
Bonjour Rav Wattenberg,

Ayant ecoute votre cours sur le leshem yihoud, j'ai souhaite en savoir plus sur le rav Yossef Messas que vous citez.

Je suis tombe sur cela sur le blog modernorthodox

'Ainsi, il autorise les femmes mariées à ne pas se couvrir la tête-3,
accepte de circoncire les enfants de mères non-juives et va jusqu’à accepter de marier un cohen et une fille issue d’un mariage interdit (non-juif et juive) dans certaines circonstances-4. Précisons, si cela est nécessaire, qu’il justifiait toutes ses positions dans la plus stricte tradition halakhique.'

3Otsar Hamichtavim 3, p.211 ; Mayim Hayim II, O.H, 110

4Otsar Hamichtavim 1887

Ne possedant pas ces ouvrages j'aurais aime savoir le fondement de l'autorisation des femmes mariees a ne pas se couvrir la tete svp

Merci
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6311
Ma première réponse est:

Ne faites pas confiance à tout ce qui se dit sur internet, vérifiez avant tout si l'auteur de ce que vous lisez est un talmid 'hakham reconnu.

Sinon, ne lui accordez pas votre confiance sans avoir au préalable analysé et vérifié chaque mot.

Il y a ceux qui mentent sciemment et il y a aussi ceux qui se trompent constamment.

ça n'est pas tout de savoir lire et traduire l'hébreu, le Am Haarets se trompera encore même en ayant le texte et le dictionnaire sous les yeux.
Voyez ce que j'explique ici:
http://www.techouvot.com/refome_ou_progres-vt14592.html?highlight=


Mais c'est en fait ce que vous tentez de faire en posant la question ici: vérifier si tout ceci est vrai. Bravo.
Et vous avez bien fait, car ça n'est pas "tout à fait vrai" selon moi.

(Vous pouvez -et devez- aussi remettre en question ce que JE vous écris ici, vérifiez ce que je vous dis, renseignez-vous, ne faites pas confiance à un inconnu.
Toutefois, si vous avez le choix entre accorder votre confiance à un inconnu qui confirme ce que tous les rabanim disent ou alors faire confiance à un autre inconnu qui contredit tous les rabanim, il vaut mieux accorder votre confiance au premier, le temps de pouvoir vérifier par vous-même
[et ça aussi, vérifiez-le par votre bon sens avant de me croire])


Ne parlons que du point qui vous intéresse (le couvre-chef des femmes) car il serait trop long de tout traiter.

Dire: "il autorise les femmes mariées à ne pas se couvrir la tête" me semble faux.
En lisant le texte (Otsar Hamikhtavim §1884) on constate avant tout que son intention n'est QUE de donner un limoud zkhout sur les femmes qui ne respectent pas cette halakha et il me semble que s'il voulait dire plus que cela (=un héter officiel et lekhat'hila), il faudrait admettre qu'il se soit trompé car ses arguments ne permettent pas une telle conclusion!

Lisez mon explication (postée il y a 4 ans sur ce site) à cet endroit:
http://www.techouvot.com/kimhit_berakha_ou_kelala-vt14692.html?highlight=messas
dans mon message du 29 mars 2012, je réponds à des internautes qui comme vous avaient lu cette information vraisemblablement sur le même site que vous, qui indique "qu'il n'y a pas d'interdit à ne pas se couvrir la tête".

En suivant ce lien, le mot Messas sera en rouge pour retrouver plus facilement les citations qu'en font deux internautes et l'endroit où j'explique ce texte dans mon post.

Je vous conseille de tout lire depuis le début (et il y a aussi une suite, il y a deux pages sur le site), mais lisez au moins ce message vous comprendrez pourquoi je dis que rav Messas n'est pas venu ANNULER le couvre-chef féminin (d'ailleurs, sa femme se couvrait les cheveux...).

J'ajoute encore un point:
dans ce texte vous verrez que j'explique que le raisonnement de rav Messas ne concerne que le fait de se couvrir la tête à l'intérieur (à la maison), pas à l'extérieur.
C'est pourquoi je préfère expliquer qu'il ne s'inscrit que dans un gueder de limoud zkhout, car s'il fallait dire que son intention était réellement de dire que c'est Moutar (comme l'écrit le blog que vous avez lu), il faudrait admettre que le Rav Messas ait commis une erreur de raisonnement (qui invaliderait -de toute façon- sa preuve).

Donc dans les deux hypothèses, qu'il se soit trompé ou non, il est interdit aux femmes de sortir la tête découverte dans la rue.

Je tenais à présent à ajouter que même sa preuve basée sur le Maharam Alaskar relèverait d'une erreur d'appréciation du même acabit, car ce dernier ne parle que de Dat Yehoudit et non de Dat Moshé.
C'est ce que souligne le rav Avraham Dorai dans son magnifique Shout Aderet Tiferet (I, §34, p.160).



APRES que vous ayez lu ce post (vers lequel je renvoie plus haut), j'ajouterais une autre idée qui semblent ignorée par l'auteur de ce blog et par tant d'autres.

C'est une idée dont j'ai parlé justement CE MATIN avec rav David Yossef (auteur du Halakha Broura, fils de rav Ovadia Yossef)

La voici: il faut savoir que l'on peut trouver des opinions permissives sur quasiment TOUT dans la halakha (dès que ce n'est pas explicite dans la Torah de manière absolument claire).
Respecter la halakha ne consiste pas à trouver une opinion s'accordant avec chacune de nos actions, mais de suivre un "mouvement", une "pensée", une conception générale des sages.

Il y a (déjà au niveau du Talmud) un sage qui pensait qu'il n'y aura PAS de mashia'h (Sanhedrin daf 98),
un autre pensait que la Bar Mitsva est à 12 ans (Nida daf 45b),
un qui autorise d'uriner aux toilettes en ayant les tfilines sur soi (!) (Brakhot 23a),
un qui disait Boré minei deshaïm à la place de Boré Pri Haadama (Brakhot 35a),
un pour qui on ne prie Moussaf qu'en Tsibour, pas à la maison (Brakhot 30a),
un qui autorisait le poulet cuit au lait ('Houlin 113a), etc...

Ensuite avec les Rishonim, on en a encore plus, puis sont venus les a'haronim...
Parmi eux, certains permettent des tas de choses contraires à ce qui se fait habituellement (comme allumer la lumière (manuellement) à Yom Tov, etc.)
[tout comme certains interdisent des tas de choses qui sont considérées permises habituellement (comme interdire l'usage de la minuterie pour shabbat)].

Si un site sur internet vous dit qu'il est autorisé de manger du poulet avec du lait, que ce n'est pas la peine de faire moussaf chez soi, qu'on peut aller aux WC avec les tfilines sur soi, qu'il faut dire Boré Minei deshaïm sur les légumes, qu'on devient bar mitsva à 12 ans et que le mashia'h ne viendra jamais, vous ne douterez pas un instant que l'auteur de ces "psakim" est un Am Haarets qui est tombé sur des textes et décide que c'est "la halakha" sous prétexte que c'est bien la shita d'un Tana ou d'un Amora.

Pourtant, lorsque l'on cherchera systématiquement les koulot des Rishonim ou des a'haronim, on a parfois tendance à se dire "puisque ces rabbins étaient à une période post-talmudique, c'est qu'on ne contredit pas le Talmud en les suivant".

C'est vrai, cependant la halakha c'est suivre le Talmud SELON l'interprétation majoritaire (Cf. Sanhedrin 33a), ce n'est pas collectionner les héterim (permissions isolées) de chaque possek et pratiquer un judaïsme qu'aucun de ces poskim n'aurait toléré!

Le Rav Messas s'opposait à des opinions que le blog que vous avez lu soutient certainement.

(Par exemple, le Rav Messas s'est opposé au Rav Goren -et particulièrement lors de son héter des mamzérim dans l'affaire dite des « frère et sœur » voir ici: http://www.techouvot.com/kabalat_chabat_origine-vt1928.html?highlight= dans mon post du 15 août 2014)

Je ne dis pas que lorsqu'on suit l'opinion d'un rabbin on se doive de le suivre de A à Z sur toutes ses shitot, mais je dis qu'on ne doit pas "faire son marché" en fonction des koulot que l'on peut trouver à droite et à gauche.

Car, encore une fois, agir selon la halakha ce n'est pas trouver une shita qui justifie chacune de nos actions, c'est trouver une cohérence dans la avodat Hashem.

Si l'ensemble des psakim que l'on se crée est en finale dénoncé dans sa globalité par tous les rabanim sur lesquels on s'appuie (et leurs héritiers spirituels), si aucun des rabanim dignes de ce nom ne valide sa totalité, c'est qu'on sort du cadre de la halakha.

Si rav Messas permettait telle ou telle chose (car il a en effet été très meikel sur certaines choses), il était contre la hashkafa générale qui anime ces gens qui cherchent toutes les koulot possibles.


Mais comme je l'expliquais plus haut, Rav Messas lui-même ne PERMETTAIT PAS de retirer le kissouy rosh, car si c'était le cas, il se serait trompé dans son raisonnement (et de toute manière sa conclusion serait donc fausse, on ne pourrait donc pas s'appuyer dessus) -voir ce que j'écris grâce au lien indiqué.

Il faut savoir qu'un grand Rav PEUT se tromper.
Il y a une hashkafa assez moderne selon laquelle un grand Rav ne pourrait pas se tromper, selon moi cette hashkafa frise l'apikorsout.

Le Talmud affirme qu'un rav peut se tromper et que c'est arrivé dans l'histoire, chez les Amoraïm et même chez Moshé rabénou!

Je ne suis donc pas affolé de parler de cette éventualité; Rav Messas peut se tromper.

Il se trouve que je suis un très grand "fan" de rabbi Yossef Messas zekher Tsadik vekadosh livrakha, ceux qui me lisent le savent, ceux qui assistent à mes shiourim aussi.
J'adore ses sfarim, il est "délicieux" dans son raisonnement et dans sa vision de la vie.
Mais cela ne m'empêche pas de soulever des erreurs dans ses écrits -et j'en ai relevé plusieurs.


Et enfin, pour terminer, il faut aussi savoir que de nombreux psakim du Rav Messas étaient refusés par ses pairs et par les autres poskim.
Tous le respectaient et l'aimaient, mais n'étaient pas toujours d'accord avec ses décisions halakhiques.

Le Rav Ovadia Yossef s'est souvent opposé au Rav Yossef Messas avec force, il a publié des critiques et remarques sur le Shout Mayim 'Haim (voir Yabia Omer X, O"H §54 -en remarquant les expressions violentes parfois utilisées).
(voir aussi Yabia Omer III, O"H §1, 9 et aussi §29, 6)

Le Rav Matslia'h Mazouz en parle avec encore moins de respect et va jusqu'à écrire qu'on ne peut pas se fier à ses psakim! (Ish Matslia'h, 1, §3 et aussi §32)

Rabbi Méir Mazouz (annotations sur Ish Matslia'h, 1, p.552) soulignera une grave erreur du Rav Messas sur les hilkhot shabbat dans son Otsar Hamikhtavim (§1765).
Il cite aussi au nom de R. S. Idan, que Rabbi Ra'hamim 'Haï 'Hwita Hacohen interdisait à ses élèves la lecture du Mayim 'Haim car ses koulot sont parfois excessives... (ce qui n'empêche pas ce rav de citer lui-même le Mayim 'Haim dans son Sim'hat Cohen I, §5).

Bref, le rav Messas était d'après tout le monde (enfin, ceux qui l'ont connu) un grand Tsadik, mais ses psakim ne sont pas toujours "validés" /acceptés dans la halakha.

Il y a pire encore, par exemple le Meam Loez, dont les halakhot sont très discutées, voir Pélé Yoets (erekh Assoufa) et voir ce que j'écris ici:
http://www.techouvot.com/pour_rav_wattenberg_au_sujet_du_pele_yoets-vt17511.html?highlight=
(message du 19 mars 2015)


Dernière édition par Rav Binyamin Wattenberg le Mer 15 Juin 2016, 19:34; édité 1 fois
verna
Messages: 96
Merci Rav pour cette reponse detaillee, je crois effectivement que la cle est de toujours apprehender les choses avec recul et ne pas condamner ou encenser un Rav sur une partie de son enseignement, sans tenir compte de l'ensemble de son oeuvre, ses avis, son epoque.

Concernant votre phrase suivante :
"Si l'ensemble des psakim que l'on se crée est en finale dénoncé dans sa globalité par tous les rabanim sur lesquels on s'appuie (et leurs héritiers spirituels) , si aucun des rabanim dignes de ce nom ne valide sa totalité, c'est qu'on sort du cadre de la halakha"

J'aimerais en profiter pour vous poser une question. Ayant recemment echange avec un talmid hakham brillant du monde dati leumi, je lui posais la question suivante dont voici les extraits , etant moi meme ole hadash, un peu a la croisee du monde haredi et dati leumi (plus en age de faire l'armee donc lo nogea badavar)

'J'aimerais savoir comment concilier le fait de préconiser d'aller à l'armée et les recommandations de gdolim, assez unanimes, qui pour le coup, séfarades ou ashkenazes recommandent consensuellement, de ne pas y aller (rav elyashiv zatsal, rav ovadia zatsal, rav steinman, rav kanievsky etc etc).
La tora nous enjoignant d'écouter les recommandations des sages de notre temps, meme s'ils nous disent que la gauche est la droite ou l'inverse, cela semble bien s'appliquer ici.
Je sais bien que le monde dati leumi compte aussi des gdolim, mais j'ai du mal à imaginer que des rabbanim tels que rav kanievsky, aient fait l'impasse sur les passages de la tora, qui sont mis en exergue par les dati leumi pour proner l'armée.

Il me semble que le propre du gadol est de voir les évènements à 100 ans pour le peuple, et meme si son avis peut paraitre radical, il s'inscrit dans une perspective que seul lui peut avoir.

La emouna dans les hakhamim peut-elle se concilier avec le choix de l'armée ?"

Sa reponse est ci-dessous, il me semble que la encore, son raisonnement se tient , alors que faire quand la halakha peut sembler prouver l'inverse de la hashkafa pronee par l'immense majorite des posskim. La meme question se retrouverait sur le sujet de travailler ou pas ( avec les fameux passages du rambam sur la mepris pour celui qui ne travaille pas et qui veut etudier al tora sur le compte d'autrui, meme s'il me semble que le choulhan aroukh lui approuve le torato oumanouto, idem sur l'habit noir-blanc hareidi etc etc

Bref halakha et hashkafa , comment s'en sortir ?
Si avec le recul de plusieurs centaines d'annees il est plus facile de savoir comment apprehender les choses concernant des hashkafot ou rabbanim anciens, comment faire pour ceux de notre epoque, faut-il attendre 200 ans pour savoir qui avait finalement raison ?

'L'argument "gdolim" est totalement innacceptable du point de vue de la halakha. cf.Roua'h Hayim sur Avot I, 4 et Ye'have Daat 4, 55.
L'argument "gauche et droite" est refute par le Yerouchalmi Horayot Chap. 1 et implicite dans le Babli. cf. Rav 'Hida dans Chaare Yossef.
Nulle part la Thora n'a mis comme condition des mitzvoth qu'elles soient accomplies dans un cadre religieux.'

Merci d'avance
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6311
La réponse est très longue, je ne pourrais pas tout expliquer convenablement.

Ce que votre ami brillant Talmid ‘hakham vous a répondu est empreint d’une fougue sympathique, mais pas digne d’un talmid ‘hakham assagi.

Les références qu’il cite indiquent qu’un gadol peut se tromper et si l’élève a une objection non répondue sur la décision du rav, il doit tenir compte de son objection et continuer à chercher, car « parfois » la vérité sera avec l’élève.

Votre brillant ami en déduit que dès que l’élève à une objection, il n’est plus tenu de suivre le maître, sans même se confronter au Rav, il décide que le rav n’a rien à répondre et que par conséquent l’élève a « assurément » raison.

Ce n’est pas un raisonnement sage.
Lorsqu’on ne comprend pas son Rav, il faut poser les questions.
Si ses réponses sont insuffisantes, il ne faut pas s’en contenter, mais ça ne veut pas encore dire d’en faire systématiquement et tout de suite qu’à sa tête ! il faut essayer de se renseigner autrement, demander à d’autres rabanim, chercher dans les sfarim etc.
Car en principe quand le rav dit quelque chose et que je pense l’inverse, c’est plutôt lui qui a raison.

A plus forte raison lorsque des centaines de grands rabanim pensent tous une chose et que « je » ne suis pas d’accord et à plus forte raison dans le cas qui nous occupe où de nombreux rabanim sionistes souscrivent aux vues de ces rabanim non-sionistes !

Il suffit d’avoir un minimum de bon sens pour se rendre compte qu’il est ridicule d’envoyer valser des centaines de Gdolei Israel d’un revers de main sans s’être donné la peine de les rencontrer pour en discuter.

De manière générale, même si les rabanim peuvent se tromper, avant d’en décider ainsi, il faut se donner les moyens d’analyser leur opinion.

Bref, la phrase « L'argument "gdolim" est totalement inacceptable du point de vue de la halakha » est ici un argument totalement inacceptable du point de vue du bon sens.

Votre ami érudit semble considérer que l’opinion des rabbins interdit strictement et simplement de faire son service militaire.

Ceci est faux.

C’est Rav Steinman en personne qui a encouragé la création du Na’hal ‘Harédi.

Si les rabbins encouragent les jeunes à suivre un parcours « yeshiva » plutôt qu’un parcours « yeshivat Hesder », il faut savoir que leur avis est partagé par des rabanim sionistes aussi !

De mémoire (ça reste à vérifier), le Rav Aviner et le rav Eliezer Melamed en font partie.

Pour ce qui est d’un jeune qui ne serait pas sérieux en yeshiva, bien entendu, Rav Steinman l’encourage à faire son service militaire au Na’hal ‘harédi.

[On se plait à dire que c’est un changement opéré par rav Steinman mais que Rav Shakh s’y opposait strictement, sans être tout à fait faux, il faut savoir que pour Rav Shakh aussi, un élève de yeshiva qui ne fait que chauffer les bancs ferait mieux d’aller à l’armée.
Il l’a dit quasiment dans ces mots –mais en yiddish- lors d’un Shmouess à la Yeshiva vers 1993 je crois.
Sa drasha a été imprimée, mais cette phrase en a été retirée !

Les « religieux » ont une manie de la censure qui les pousse parfois à censurer leurs propres dirigeants…]

Pour ce qui est du Yeroushalmi qui « réfute » l’argument "gauche et droite", ce n’est pas une « réfutation » mais une interprétation différente de celle que certains comprennent du Bavli.

Elle dit qu’il ne faut pas suivre le rabbin lorsqu’il se trompe et dit sur la droite que c’est la gauche, c-à-d lorsque l’erreur est flagrante.
Ce qui ne me semble pas être le cas chez nous de toute manière.

Quant à l’argument « massue » stipulant que « Nulle part la Thora n'a mis comme condition des mitzvoth qu'elles soient accomplies dans un cadre religieux », il relève soit de l’ignorance, soit de l’incompréhension, soit d’un manque de bonne volonté.

Votre ami vient-là réfuter la position des rabbins qui mettent en garde contre l’enrôlement dans la mesure où le service militaire s’exécuterait dans un cadre « non-religieux » -qui est en fait aussi assez souvent hostile à la religion.

Selon lui il n’y a aucun souci à se retrouver dans un cadre hostile au respect des mitsvot, à chacun d’être fort et de se maintenir dans la pratique malgré les difficultés.

S’il a raison pour une situation a posteriori, pour ce qui est de s’y insérer a priori, il a assurément tort.

Et s’il ignore les textes du Talmud mettant en garde contre ce type de démarche (=se mettre dans une situation où il sera difficile de ne pas fauter) (comme Avoda Zara 17b et Baba Batra 57b), s’il ne comprend pas ainsi la prière récité le matin où l’on demande à D.ieu de ne pas nous mettre en position de Nissayon, il pourrait tout de même comprendre par lui-même que ce n’est pas souhaitable et que de nombreux, de très nombreux jeunes militaires ont nettement régressé en yirat shamayim lors de leur service.

Ça n’est pas un secret, tout le monde sait que l’armée en Israël a fait regresser spirituellement des milliers de jeunes, mais il y a ceux à qui ça fait de la peine et ceux qui s’en remettent assez facilement.

ça ne veut pas dire qu'il faille éviter l'armée pour le principe, il est certain qu'un pays a besoin de soldats et l'éventuelle régression spirituelle qui en découlerait n'est pas ici pointée du doigt. Mais il s'agît d'une régression flagrante et évidente en raison des conditions très hostiles de Tsahal (unités classiques) au maintien de la yirat shamayim.


Bien, jusque là, j’ai pris la « défense » des rabbins, mais il faut aussi souligner l’incohérence de certains milieux « ultra-religieux » qui préfèrent laisser leur fils en yeshiva alors qu’il n’étudie pas plus qu’un militaire à l’armée, plutôt que de l’envoyer faire son service dans l’unité religieuse qui –comme on le constate- préserve beaucoup mieux la yirat shamayim des conscrits que les autres régiments.

Alors quand vous demandez
Citation:
La emouna dans les hakhamim peut-elle se concilier avec le choix de l'armée ?

je réponds que oui, elle le peut, puisqu’il est possible (et même préférable dans certains cas) d’aller à l’armée au Na’hal ‘harédi.

Il ne faut pas rêver, un pays sans armée, c’est la catastrophe.
Il faut arrêter avec les niaiseries religieuses selon lesquelles « si tous les Bnei Israel se mettent à étudier la Torah, nous n’aurons aucune guerre et tout ira bien ».

Nous voyons bien qu’à l’époque des rois tsadikim, la vie n’était pas toujours rose et ils maintenaient une armée.

Sous ‘Hezkia par exemple, le Talmud nous dit que tous les juifs étudiaient la Torah (Sanhedrin 94b) ce qui n’a pas empêché les guerres et le maintien de l’armée (cf. Melakhim II, XVIII, 13).

Même si la tsidkout du peuple peut laisser espérer l’avènement messianique, il faut comprendre que le simple fait d’étudier ne garantit pas encore la tsidkout totale (-même s’il la favorise), cette dernière n’étant pas imposable au peuple par décret.

Le Midrash (Matot Raba XXII, 3) (sur base du Passouk Elef lamaté Elef lamaté) indique une parité souhaitable entre le nombre de soldats et de yeshivistes (qui prient pour eux).

Il faut donc 50% de talmudistes, mais il faut aussi 50% de soldats !

Il se trouve qu’on est encore bien loin de cette parité, il n‘y a qu’une minorité de yeshivistes.
Même s’il faut tenir compte des talmudistes âgés (car il n’est pas nécessaire d’obtenir une parité sur la tranche d’âge concernée par l’armée, mais de manière générale, sur tout le peuple), il n’y en a que très peu.

Assez récemment, ces mêmes rabanim désapprouvés par votre ami, ont encouragé la mise en place d’un système permettant à tout soldat de Tsahal souhaitant qu’un yeshiviste prie spécifiquement pour lui (et qu’il ajoute un temps d’étude lishma à son Seder pour que ce mérite protège ce soldat), de transmettre son nom (accompagné du nom de sa mère) afin qu’il soit « attribué » à un yeshiviste qui priera tous les jours pour ce soldat.

Citation:
faut-il attendre 200 ans pour savoir qui avait finalement raison ?

Ben, oui.
Bien sûr, on peut se douter du Emet lorsqu’on voit l’unanimité chez les rabanim, mais pour savoir exactement sur chaque détail s’il était bien à sa place, on ne le constate que bien après –si on analyse avec finesse l’histoire.

Vous écrivez encore :
Citation:
La meme question se retrouverait sur le sujet de travailler ou pas ( avec les fameux passages du rambam sur la mepris pour celui qui ne travaille pas et qui veut etudier al tora sur le compte d'autrui

Je me permets de vous renvoyer vers ce cours : http://www.centre-alef.fr/2013/11/issakhar-et-zvouloun-peut-on-se-faire-aider-financierement/

Puis vous ajoutez :
Citation:
idem sur l'habit noir-blanc hareidi

Là, vous devez savoir que cet uniforme n’a rien de solide comme base, à l’époque où j’étais à la Yeshiva, il n’était pas encore admis. C’est très récent et n’a pas vraiment de valeur halakhique.

Les gdolim d’aujourd’hui ne s’astreignaient pas à ce code vestimentaire dans leur jeunesse. Certaines photos vous le prouveront.
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