Citation:
Une question qui revient souvent, notamment chez les féministes mais aussi chez des personnes sincèrement engagées dans la tradition juive, concerne la place des femmes dans l’interprétation de la loi.
Pourquoi, dans le judaïsme, l’interprétation de la halakha – y compris sur des sujets qui touchent directement la vie des femmes – est-elle réservée aux hommes ? Il est vrai que l’on peut dire que c’est Dieu qui fixe la loi, mais il y a une part importante d’interprétation humaine, de réflexion, et de psika (décision halakhique), même à notre époque.
Historiquement, les hommes étaient les seuls à avoir un accès structuré et approfondi aux textes. Mais aujourd’hui, les femmes sont tout à fait capables d’étudier, de réfléchir, et d’analyser les sources. Et surtout, lorsqu’il s’agit de sujets qui concernent directement la vie des femmes, qui mieux qu’une femme pourrait en mesurer la portée concrète ?
Existe-t-il un texte qui stipule explicitement que seuls les hommes peuvent trancher la halakha ? Certes, la mitsva d’étudier la Torah repose principalement sur les hommes, mais pourquoi empêcher les femmes d’étudier sérieusement, voire d’arriver à un niveau leur permettant de trancher ?
Est-ce que cette situation se maintient uniquement parce que le monde religieux met plus de temps à s’adapter à la modernité ? Peut-on envisager qu’un jour, des femmes aient une place reconnue dans la psika ?
Je vous remercie d’avance pour vos éclaircissements.
L’interprétation de la Halakha (en d’autres termes la « Psika »), ne revient pas aux hommes uniquement, mais aux personnes habilitées exclusivement. Si une femme s’avère être aussi compétente que Rav Eliashiv, Rav Moshé Feinstein ou Rav Ovadia Yossef, elle sera assurément consultée pour le Psak Halakha.
Voyez ce que j’ai répondu ici :
https://www.techouvot.com/viewtopic.php?p=44274
Vous avez titré votre question : «
Pourquoi les hommes décideraient pour les femmes ? », cette antienne est un poncif auquel nous ont habitués les féministes en manque de Yirat Shamayim ; car pourquoi distinguer entre hommes et femmes ?
Que diriez-vous de celui qui demanderait «
pourquoi ceux qui ont fait médecine décideraient (en matière de santé) pour les fleuristes ? Et les garagistes pour les (voitures des) avocats ?». C’est ainsi, ceux qui « décident » et dont l’opinion à une valeur, sont ceux qui se sont hissés au niveau requis.
Pour être Possek Halakha (pas seulement « moré horaa »), il faut non seulement avoir étudié le Shas, mais aussi les Rishonim. Il ne s’agit pas d’avoir suivi un cours de daf yomi pendant 7 ans, mais d’une étude approfondie telle qu’on l’apprend en Yeshiva.
Je ne connais pas une seule femme au XXIème siècle
(même parmi celles qui se sont spécialisées sur des sujets halakhiques) qui ait cette connaissance et cette compréhension des Rishonim.
Les hommes qui l’ont sont, eux aussi, rares et s’il y en a tout de même c’est bien entendu car les hommes sont beaucoup plus nombreux à avoir étudié à la Yeshiva et ça n’a rien à voir avec une prétendue faiblesse intellectuelle ou cognitive des femmes que les féministes se persuadent d’imaginer pour s’en indigner à chaque occasion.
Les femmes ne sont pas plus bêtes que les hommes, ce n’est pas le sujet. Un fleuriste peut être plus intelligent qu’un chirurgien, pourtant c’est ce dernier qu’on écoutera et à qui on fera confiance concernant une opération. Idem pour l'avocat qui peut être plus intelligent que le garagiste, mais s'y connaitra moins en voitures.
[Il existe, de nos jours, des femmes qui se spécialisent sur un sujet halakhique (par exemple Nida) et l’apprennent en profondeur. C’est un peu comme un Kollel Halakha pour femmes. Elles peuvent accéder au niveau requis pour pouvoir indiquer la Halakha, mais pas pour pouvoir trancher la Halakha (différence entre moré horaa et possek), car pour cela, une formation de ce type ne suffit pas, il faut baigner dans les Rishonim des années, tel que ça se fait à la Yeshiva.]
Bref, il ne faut pas voir des hommes qui décident pour des femmes, mais des spécialistes du Shas qui décident pour ceux qui n’ont pas acquis ce niveau et qui souhaitent tout de même savoir ce qu’un Talmid ‘Hakham préconise en matière de halakha dans un cas donné.
Par le lien indiqué plus haut vous verrez qu’une femme qui en aurait les compétences pourrait, elle aussi, donner son avis dans la Halakha et c’est déjà arrivé.
Vous écrivez :
Citation:
Historiquement, les hommes étaient les seuls à avoir un accès structuré et approfondi aux textes. Mais aujourd’hui, les femmes sont tout à fait capables d’étudier, de réfléchir, et d’analyser les sources.
Oui et non. Potentiellement capables, oui, elles sont capables, et pas seulement aujourd’hui, il y a un siècle aussi. «
Etudier, réfléchir et analyser les sources » est donné à tout le monde, même à un Am Haarets et même à un Goy. Mais l’analyse des sources par celui qui a une connaissance des Gmarot et des Rishonim n’est pas comparable à l’analyse des sources par celui qui n’a pas été plongé des années durant dans une Yeshiva à approfondir la compréhension des Rishonim. Les conclusions pourront parfois diverger de manière très conséquente.
Concrètement, les hommes sont encore (massivement) les seuls à avoir accès à ce type d’étude (des années à la « Yeshiva classique », pas un « kollel halakha »).
Citation:
Et surtout, lorsqu’il s’agit de sujets qui concernent directement la vie des femmes, qui mieux qu’une femme pourrait en mesurer la portée concrète ?
Qui mieux ? le spécialiste.
Si une femme doit subir une opération qui concerne les femmes, mais que les seuls spécialistes sur ce domaine chirurgical sont des hommes, on ne va pas se dire «
qui mieux qu’une femme pour prendre cette décision », on va faire confiance au spécialiste, qu’il soit homme ou femme, peu importe (et inversement, si les spécialistes pour une chirurgie qui concerne les hommes sont toutes des femmes, on ne va pas dire « qui mieux qu’un homme etc. »).
[Voyez aussi, par le lien indiqué plus haut, ce que j’ai écrit concernant une difficulté différente
(« je trouve certaines situations dérangeantes lorsque l'on doit parfois parler de certaines choses et que c'est la femme qui se présente chez le rabbin... En dehors du fait qu'elle serait souvent plus à l'aise d'en parler avec une femme Yoetset, j'estime qu'il peut parfois aussi y avoir un manquement au niveau de la pudeur »), mais il ne s’agit pas de dire qu’un homme ne saura pas indiquer la Halakha convenablement, seulement qu’il est préférable que ce soit une femme pour les sujets les plus intimes.]