À partir du moment où la sensation de lourdeur suite à un repas copieux est déjà ressentie, il est interdit de prendre un comprimé – même à base d'ingrédients naturels – pour soulager ses troubles digestifs.
En revanche, prendre un cachet pour faciliter la digestion avant l'apparition des sensations de lourdeur, pour les sépharades, c'est permis.
En revanche, les ashkénazes a priori doivent avant Chabbat mélanger ce comprimé dans un aliment (comme par exemple l'effriter dans du sucre en poudre).
Toutefois, celui qui prend un tel cachet pendant Chabbat sans l'avoir préalablement mélangé dans un aliment a sur qui s'appuyer.
Sources et explications:
Quelqu'un de malade qui est alité ou qui se sent très faible a le droit de prendre des médicaments pendant Chabbat, comme l'écrit le Rama (סי' שכח סעיף לח).
En revanche, quelqu'un qui ressent une douleur, mais qui n'est pas alité et qui ne sent pas très faible n'a pas le droit de prendre pendant Chabbat des médicaments autre chose que de gens en bonne santé n'ont pas l'habitude de prendre, comme l'écrit le Choul'han Arou'h (שם).
C'est un décret rabbinique qui a été institué de peur qu'on vienne à broyer des plantes médicinales.
Brulûres d'estomac
C'est pourquoi il est interdit pendant Chabbat de prendre un médicament pour soulager des brûlures d'estomac, comme l'écrivent le Chemirat Chabbat Kehil'hata (פל"ד ס"ד) et le Or'hot Chabbat (פ"כ סעיף קמד).
Cependant, prendre un médicament pour éviter que des brûlures d'estomac apparaissent est un cas différent qui s'apparente – selon certains décisionnaires – à la question de prendre des vitamines pendant Chabbat.
Vitamines pendant Chabbat:
Prendre des vitamines pendant Chabbat est une question sujette à discussion parmi les décisionnaires.
Le Choul'han Arou'h (סי' שכח סעיף ל"ז) soutient que quelqu'un en bonne santé qui ne sent aucune douleur a le droit de prendre des médicaments pendant Chabat.
Il estime qu'il est à craindre qu'on vienne broyer des plantes médicinales uniquement lorsqu'on ressent une douleur, mais pas lorsqu'on est en bonne santé et qu'on ne ressent pas de douleur.
C'est la raison pour laquelle Rav Ovadia Yossef (חזון עובדיה ח"ג פט"ז ס"ג) permet de prendre des vitamines pendant Chabbat.
C'est aussi l'avis de Rav Bentzion Abba-Chaoul (אור לציון פל"ו ס"י).
Il explique que les vitamines sont considérées comme un maakhal bri'im, c'est-à-dire quelque chose qui n'est pas consommé uniquement par des malades, du fait qu'aussi des gens absolument sains prennent des vitamines.
C'est pourquoi il est permis aux sépharades de prendre un comprimé pour faciliter la digestion tant que les sensations de lourdeur ne sont pas encore survenues.
Car – selon le Choul'han Arou'h – il est permis même de prendre un médicament lorsqu'on est en bonne santé et qu'on ne sent pas de douleur ou de dérangement.
L'opinion du Maguen Avraham:
D'un autre côté, le Maguen Avraham (שם סקמ"ג), se fonde sur les propos du Talmud Yerouchalmi (פי"ד ה"ג) pour prouver que même quelqu'un qui est en bonne santé et qui ne ressent pas de douleur n'a pas le droit de prendre des médicaments (ou autre chose que de gens en bonne santé n'ont pas l'habitude de prendre) lorsqu'il les prend pour des raisons de santé.
Rav Moché Feinstein dans ses Igrot Moché (ח"ג סי' נד) comprend que le Maguen Avraham interdit uniquement à ceux qui ont une nature faible. Mais quelqu'un qui est absolument en bonne santé a le droit de prendre des médicaments pour maintenir sa bonne santé, comme par exemple des vitamines.
Il s'appuie sur les propos du Choul'han Arou'h (סי' שכח סעיף כז) selon lesquel il est permis de mettre un bandage enduit d'une crème sur une plaie qui a déjà guéri.
Le Maguen Avraham (סקל"א) explique que dans cas, puisque la blessure est désormais guérie, il n'est pas à craindre que la panique nous amène à broyer des plantes médicinales.
Le livre Zéra Chmouel (הערה תלז) rapporte que Rav Itzhak Berkowitz (Rav du quartier Sanhedria à Jérusalem) autorise à prendre un médicament (appelé Maalox) dont le but est de prévenir les indigestions, car ce n'est que préventif.
Apparemment, il se fonde sur les propos du Igrot Moché susmentionnés qui permet à quelqu'un d'absolument sain de prendre des médicaments ou des vitamines pendant Chabbat.
Les décisionnaires qui interdisent de prendre des vitamines:
Cependant, l'interprétation que fait Rav Moché Feinstein des propos du Maguen Avraham n'est pas celle de la plupart des décisionnaires.
En effet, le Pri Megadim (א"א סקמ"ט) comprend que le Maguen Avraham interdit de prendre des médicaments même dans l'objectif de maintenir sa bonne santé pour ne pas devenir faible.
Aussi, le Michna Broura (ס"ק קכ) retient l'opinion du Maguen Avraham en expliquant qu'il est interdit de prendre des médicaments même dans l'objectif de prendre des forces.
C’est-à-dire que selon lui, même quelqu'un qui est en bonne santé et qui n'a pas une faible nature n'a pas le droit de prendre des médicaments pour prendre des forces.
C'est pourquoi Rav Chlomo Zalman Auerbach (שמירת שבת כהלכתה פל"ד הע' פו), Rav Elyachiv (שלמי יהודה פ"י הע' נא) et Rav Nissim Karelitz (חוט שני ח"ד פפ"ט סק"ב) interdisent de prendre des vitamines pendant Chabbat, car cela s'inscrit dans l'interdit mentionne par le Michna Broura de prendre des médicaments pour prendre des forces.
Nous pouvons en déduire que selon ces décisionnaires, il est interdit de prendre un comprimé pour faciliter la digestion même avant de sentir des sensations de lourdeur, car d'après eux, il est interdit de prendre des médicaments ou des vitamines même lorsqu'on est en bonne santé et qu'on ne sent pas de douleur ou de dérangement.
Voyez aussi Az Nidberou (ח"א סי' לב) qui interdit d'appliquer une lotion sur sa peau pour prévenir l'apparition de boutons d'acné.
Il explique que pour une maladie chronique, on ne peut pas s'appuyer sur le Choul'han Arou'h (שם סעיף כז) qui permet de mettre un bandage enduit de crème sur une plaie qui a déjà guéri, du fait qu'il n'est pas à craindre que la panique nous amène à broyer des plantes médicinales.
Car, contrairement à une blessure qui a guéri, quelqu'un qui souffre d'une maladie chronique a toujours peur que sa maladie réapparaisse.
Prévenir un mal:
Certes le Michna Broura (סי' שכח ס"ק קמד) permet à quelqu'un qui a un œil enflé d'y poser un objet métallique pour éviter que l'enflure se propage.
On aurait pu en déduire qu'il est permis d'effectuer un traitement médical pour prévenir une douleur.
Cependant, le Cha'ar Hatzioun (ס"ק קד) précise que c'est permis du fait que ce n'est pas une chose qu'on a l'habitude de faire avec des médicaments.
Par conséquent, nous ne pouvons pas nous appuyer sur ces propos dans notre cas où il s'agit d'avaler un comprimé.
Mélanger un médicament dans un aliment:
Le Choul'han Arou'h (סי' שכח סעיף כא) évoque un remède ophtalmologique qui consiste à appliquer sur son œil une certaine plante médicinale (קילורין) après l'avoir trempée dans de l'eau.
Il écrit que si on a trempé cette plante avant Chabbat, il est permis de l'appliquer sur son œil pendant Chabbat, car c'est considéré comme un chinouï, c'est-à-dire une manière inhabituelle de préparer cette médication.
Rav Chlomo Zalman Auerbach שמירת שבת כהלכתה פל"ד הע' כד en déduit que si nous mélangeons avant Chabat un médicament dans une boisson ou dans un aliment (comme par exemple effriter un comprimé dans du sucre en poudre), il est permis de se l'administrer pendant Chabbat, à condition que notre entourage ne se rende pas compte que nous prenons un médicament. Et c'est l'avis que retient le Or'hot Chabbat (פ"כ סעיף קלא).
Certes, Rav Elyachiv (שבות יצחק רפואה פי"ד אות ג סק"ב) et Rav Nissim Karelitz (חוט שני ח"ד פפ"ט סקל"א) soutiennent que c'est interdit, car un aliment dans lequel on a mélangé un médicament n'est pas considéré comme un maakhal bri'im, c'est-à-dire que c'est un aliment que des gens en bonne santé n'ont pas l'habitude de prendre.
Cependant, en ce qui concerne les vitamines et les comprimés dont le but est de faciliter le jeûne, ils admettent qu'il est permis de les prendre lorsqu'ils ont été mélangés avant Chabbat dans un aliment.
A priori, il en va de même pour les comprimés qu'on prend pour faciliter la digestion.