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Kidoush précédé de Shabat Mekoudash

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rH
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Chalom Rav Wattemberg,

Dans certaines famille marocaines (en France notamment), il y a l'habitude de dire "chabat mekoudash" avant de dire "yom hachichi" dans le kidouch du vendredi soir. D'où vient cette coutume ?
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6995
Citation:
Dans certaines famille marocaines (en France notamment), il y a l'habitude de dire "chabat mekoudash" avant de dire "yom hachichi" dans le kidouch du vendredi soir. D'où vient cette coutume ?


D’où vient-elle ? clairement du Maroc !
[Pas tous les marocains la suivent, Rav Shalom Messas ne disait pas « Shabbat Mekoudash » (Maor Hashemesh I -Jér. 2008, p.125).]

Je crois -sans en être certain- que c’est une coutume purement marocaine.

Comment s’est-elle créée ? ce n’est pas bien clair.
A priori on pourrait même questionner la validité de ce Minhag dans la mesure où mentionner qu’on est Shabbat juste avant le Kidoush ferait peut-être « perdre » la Mitsva deorayta du Kidoush, comme le soulignent les A’ahronim concernant celui qui dit Shabbat Shalom le vendredi soir en sortant de la synagogue, qui s’acquitte par-là de la Mitsva Deorayta de « mentionner le shabbat à son entrée », de sorte que son Kidoush ne sera plus que Miderabanan.
Ainsi, celui qui voudrait préserver le caractère Min Hatorah de son Kidoush devrait ne pas souhaiter Shabbat Shalom le vendredi soir avant d’avoir fait kidoush (!).

Rabbi Akiva Eiger est connu pour avoir soulevé ce point (cf. Mishna Broura §271, sk.2) et les A’haronim s’en étonnent car, s’il est vrai que le simple fait de mentionner qu’on est Shabbat nous acquitte de la Mitsva Min Hatorah, il n’en demeure pas moins que ce n’est pas uniquement en souhaitant Shabbat Shalom, mais déjà, systématiquement, par la Tfila du vendredi soir où l’on mentionne qu’on est Shabbat.
De sorte que, d’après cette idée, le Kidoush est toujours « seulement Miderabanan » (sauf pour celui qui ferait entrer le Shabbat dès le Plag et mangerait la Seouda avant de faire Maariv…).

En suivant cette idée, on pourrait imaginer que l’origine du Minhag de dire Shabbat Mekoudash serait une manière de rétrograder volontairement le Kidoush à un niveau Miderabanan pour toute l’assemblée, en raison des femmes et de ceux qui n’auraient pas prié Arvit.
En effet, si le père de famille était à la synagogue et a déjà prié Arvit (et/ou souhaité Shabbat Shalom à des amis), son obligation de faire kidoush n’est plus que Miderabanan.
Or, si son épouse n’a pas prié et n’a pas souhaité Shabbat Shalom (etc.), son obligation de « mentionner le shabbat à son entrée » serait encore « intacte » et Min Hatorah, donc son mari ne devrait pas pouvoir l’acquitter de son obligation de Kidoush qui est, pour elle, Min Hatorah, par un kidoush qui n’est que Miderabanan car récité par lui.
Donc le mari dira Shabbat Mekoudash (et certains ont pour habitude que l’assemblée réponde « Shabbat Shalom »), de sorte que tout le monde sera concerné par une obligation de kidoush seulement miderabanan.

Une idée similaire se trouve dans le Or Letsion (II, §20,1 -p.179) qui indique qu’il est souhaitable que la femme dise « Shabbat Shalom » afin qu’elle ne soit pas tenue du Kidoush Min Hatorah mais seulement Miderabanan, de sorte qu’elle puisse être acquittée par le Kidoush de son mari qui n’est que Miderabanan.
Voir aussi le Maguen Avot (Jér. 2014, p.241-2) (au nom de la Hagada Ko Le’haï) qui applique cela au minhag marocain de dire « Shabbat Mekoudash », comme je l’ai proposé ici.
(Tout ceci est discutable, mais bon. Cf. Yabia Omer IX o’’h §108,128.)

C’est assez étrange comme idée puisque finalement la femme s’acquitterait de l’obligation Min Hatorah par les mots « Shabbat Mekoudash » (ou par un shabbat shalom etc.), bien qu’ils ne revêtent aucunement le caractère d’une obligation Min Hatorah ni miderabanan, dès lors, pourquoi le kidoush -quand bien même rétrogradé à du Derabanan- ne pourrait pas faire office d’accomplissement de la Mitsva min Hatorah pour elle ?
[Cette idée s’applique lorsqu’on veut acquitter quelqu’un de Birkat Hamazon ; celui qui n’y est tenu que Miderabanan ne devrait pas pouvoir acquitter celui qui est tenu de faire Birkat Hamazon Min Hatorah, mais ici, si l’on peut s’acquitter par un simple « Shabbat Shalom » ou toute autre mention du jour du Shabbat, pourquoi imaginer qu’un Kidoush Miderabanan serait moins efficace qu’un « Shabbat Shalom » ?]

J’ai lu d’autres auteurs (Likrat Shabbat, Modiin 2001, p.314, note 69) qui écrivent que le sens de ces mots (Shabbat Mekoudash) est d’attirer l’attention des femmes qui seraient distraites, afin qu’elles écoutent le kidoush et ne parlent pas (ce n’est pas très clair dans ce livre, quelques lignes plus haut il écrit que c’est pour « acquitter » les femmes car elles ne sont pas assez attentives au kidoush, puis, plus bas, il écrit que c’est pour mettre en garde les femmes et attirer leur attention afin qu’elles écoutent le kidoush attentivement -mais pas qu’il s’agisse de les acquitter avec ces deux mots seulement. On a l'impression qu'il a mélangé deux idées différentes).

Proche de cela, dans Otsrot Haposkim (‘Haïfa 1998, p.179, note 46), il est rapporté au nom d’un « sefer ancien » (Sefer Kadoum) qui explique que le but (de cette phrase Shabbat Mekoudash et la réponse Shabbat Shalom) est de faire en sorte que si les femmes entendent ne serait-ce que la brakha sur le vin, cela complèterait et suffirait pour s’acquitter du Kidoush (toujours cette crainte qu’elles ne soient pas attentives sur toute la brakha du Kidoush).

J’ai pensé aussi expliquer, toujours selon ces craintes très marocaines que les femmes ne soient pas attentives au Kidoush dans sa totalité, qu’en réalité ce « Shabbat Mekoudash » venait palier à un autre problème, celui de la compréhension de ce qu’on dit dans le Kidoush.
On supposait que les femmes n’allaient pas (toutes) comprendre l’hébreu et donc ne pas savoir ce qui est dit dans le Kidoush, c’est pourquoi on proclamait « shabbat Mekoudash » qu’elles comprenaient et elles s’acquittaient ainsi du Kidoush.

Une autre idée à laquelle j’ai pensé, peut-être que ce Minhag est né lorsqu’on faisait entrer le Shabbat avant l’heure, de sorte que même en rentrant de la synagogue, l’heure du Shabbat n’était pas encore arrivée et il se pourrait que certaines personnes présentes n’aient pas encore pris le Shabbat sur elles et seraient encore en train de faire des choses incompatibles avec le Shabbat (tenir du Mouktsé, voire faire une Melakha…).
Le Baal Habayit proclame donc "Shabbat Mekoudash" pour annoncer que « ça y est, c’est Shabbat », afin que chacun dépose son Mouktsé ou arrête sa Melakha AVANT que l’on débute le Kidoush, sans quoi ils ne pourraient pas s’acquitter du Kidoush.
Un bémol : a priori les femmes ont forcément déjà allumé les Nérot, et pour les enfants, ils devraient être entrainés par la Kabala de la mère. Il ne s’agirait donc que des adultes (+ de 13 ans) qui ne seraient pas allés prier.

Quant au choix de la formule (pourquoi utiliser le terme Mekoudash -shabbat est « sanctifié »- plus que « Shabbat commence/débute/entre/etc. »), il semble que ce soit pour reprendre l’expression du Zohar (II, 136a) qui dit qu’une voix annonce dans le ciel à l’entrée du Shabbat « Mekoudash, Mekoudash ».
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