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La réponse de qualité à vos questions

Comment considérer la beauté ?

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Talmid Hakham en devenir
Messages: 18
Bonjour,

Est-ce permis/recommandé de prier pour se marier avec un beau mari/une belle femme ?
Et si oui, y a-t-il des prières spéciales qui ont été écrites à ce sujet ?

Ma question ne vient évidement pas exclure les prières classiques et indispensables de prier pour un zivoug kasher, avec de bonnes midoth et de la Yrat Shamayim. Je demande seulement si en plus de cela il est possible de demander un zivoug que l'on trouve beau physiquement, ou si hashkafatiquement ce n'est pas conseillé - "mensonge que la grâce, vanité que la beauté".


Merci par avance,

Kol tuv
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6335
Nous trouvons que la Torah valorise la beauté, lorsqu’elle nous raconte sur nos matriarches qu’elles étaient belles, si cela n’avait aucune sorte d’importance, à quoi bon le préciser ?

Pourquoi souligner la beauté de différents personnages bibliques, comme :

Sarah (Bereshit XII, 11)

Rivka (Bereshit XXIV, 16 et XXVI, 7)

Ra’hel (Bereshit XXIX, 17)

Esther (Esther II, 7)

Avigaïl (Shmouel I, 25, 3)

Bat Sheva (Shmouel II, 11, 2)

Avishag (Melakhim I, 1, 3-4)

Les filles de Job (Iyov ILII, 15)

‘Hava (Baba Batra 58a)

Ra’hav (Meguila 15a)

Kozvi Bat Tsour (Midrash Agada Bamidbar XXV, 2)

(dans certains cas, comme pour cette dernière, on peut imaginer des nécessités de souligner leur beauté, mais pas pour tous ces cas)


Certains hommes bibliques aussi, comme

Adam (Baba Batra 58a),

Yaakov (Baba Batra 58a),

Shaoul (Brakhot 48b),

Yossef (Bereshit XXXIX, 7 et Rashi Bereshit IL, 22)

et Avshalom (Otsar Midrashim p.445).



Aussi, les sages (Brakhot 57b) soulignent l’atout d’être mariée à une jolie femme en disant :
שלשה מרחיבין דעתו של אדם, אלו הן דירה נאה, ואשה נאה, וכלים נאים
[il y a trois choses qui contribuent à l’épanouissement (spirituel) de l’homme : une belle demeure, une belle épouse et de beaux meubles/objets.]

Un texte dans le Talmud (Meguila 15a) énumère les quatre plus belles femmes de l’Histoire, le Midrash Assara Harouguei Malkhout (Otsar Midrashim p.445) quant à lui énumère les sept plus beaux hommes.

Un autre texte dans Avoda Zara (20a) souligne la beauté d’une femme (épouse de Turnus Rufus) ainsi que d’une autre aperçue malencontreusement par Rashbag (texte qui indique bien que ce dernier accordait une importance à la beauté -cf. Shiourei Daat I, p.193).
La Gmara Brakhot (58b) fixe même une bénédiction à réciter à la vue d’une belle personne (et selon le Yeroushalmi -cité dans Tosfot AZ 20a sv. Haroé, même à la vue d’un bel animal) et il y a encore plusieurs textes allant dans ce sens et donnant de l’importance à la beauté physique.

Quant à votre question basée sur le verset (Mishlei XXXI, 30) שקר החן והבל היופי qui semble indiquer la futilité de la beauté, c’est une bonne question.

Différents auteurs s’en sont évidemment emparés, chacun y répondant à sa manière.

En laissant de côté les réponses qui n’ont pas l’air de s’inscrire dans le Pshat, vous constaterez que le lien entre toutes les (bonnes) réponses est …qu’elles ne répondent pas vraiment !

Voyez par exemple le Kdoushat Lévi (Vayetsé, Bereshit XXIX, 17) et le Maharal dans Gour Arié (Bereshit XXIII, 1 -vers le début de ‘Hayei Sarah, sv. Bat Esrim) qui s’interrogent respectivement sur des passages où l’ont loue la beauté de Ra’hel et de Sarah et se demandent comment concilier cela avec le verset de Mishlei.

Je vous indique ces sources que je ne souhaite pas retranscrire, mais je suppose qu’après les avoir lues, tout en ayant retiré la satisfaction de voir votre question posée, vous serez assez déçu des réponses qui ne répondent pas vraiment/suffisamment à l’interrogation.

Quant aux réponses qui vont dans le sens de celle du Yaabets (Taanit 31a) [pour qui la beauté (qui est louée) est celle des bonnes Midot et celle qui est critiquée, est la beauté physique], je veux bien, mais ça ne colle pas avec les textes.

Mon interprétation est, quant à elle, simple : שקר החן והבל היופי ne signifie pas que la beauté n’a aucune valeur, mais simplement qu’elle n’est pas un critère auto-suffisant pour lui conférer de la valeur.

C-à-d qu’une personne qui n’a QUE la beauté, n’a en fait RIEN du tout.
Mais une personne de bon caractère qui a aussi la beauté, cela ajoute à sa « valeur ».

Lorsqu’on fait l’éloge des matriarches, c’est parce que cet atout physique s’additionne à une beauté morale et lorsque le verset de Mishlei dit que la beauté est mensongère, il veut parler de ceux qui seraient tenter de juger une personne uniquement sur son physique.

Je rappelle d'ailleurs que le même livre (Mishlei XI, 22) dit aussi :
נזם זהב באף חזיר אשה יפה וסרת טעם
(traduction très libre : une femme belle et bête est comparable à un anneau nasal en or dans le groin d’un cochon).

Ce qui laisse entendre que la beauté (ici comparée à l'or) est une valeur, même si elle est méprisable dans certaines situations (lorsqu'elle est liée à la bêtise/au manque de Midot).

Voilà qui répond -il me semble- à toutes les contradictions autour de ce thème.

Voilà aussi pourquoi les Sages n’ont pas hésité à qualifier d’autres vraies valeurs de Sheker en leur appliquant notre verset « Sheker Ha’hen », comme dans Sanhedrin (20a) où l’on dénigre ainsi l’effort pour l’étude de la torah de la génération de Moshé, de Yeshoshoua et de ‘Hezkia, par rapport à celle de Rabbi Yehouda bar Ilay. Pourtant, on ne peut pas dire que celles de Moshé, Yehoshoua et ‘Hezkia étaient nulles.

Ainsi, on (Sanhedrin 20a) dénigre aussi la retenue devant la Aveira de Yossef et de Boaz par rapport à celle de Palti ben Laïsh, bien que Yossef et Boaz ne furent pas des impies.

Idem dans le Midrash Mishlei (XXXI) où l’on dénigre Noa’h et Adam face à Moshé en leur appliquant ce même verset. Etc.

Ce qui indique bien que « mensonge que la grâce, vanité que la beauté » ne veut pas dire que c’est totalement vide d’intérêt, mais que c’est vide d’intérêt tant que ce n’est pas accompagné par de « vraies » valeurs.

J’ai lu avec satisfaction dans le Pélé Yoets (sv. Yofi) que le verset « mensonge que la grâce, vanité que la beauté » ne s’applique que lorsqu’on ne trouve qu’une femme sans Yirat Shamayim, mais si elle en est dotée en plus de sa beauté, il est certain que cette beauté est un atout et une valeur.
Il écrit qu’il est important de se marier avec une jolie femme (il parle en fait du père qui doit chercher de belles épouses pour ses fils, mais ça revient au même pour notre époque) pour ne pas avoir les yeux sur une autre.


Je sais que la compréhension habituelle de ce verset consiste à dire que la beauté n’a aucune espèce de valeur/d’intérêt, mais ce n’est pas ce qui ressort des versets de la Torah, ni des paroles des ‘Hazal.

C’est seulement l’argument des filles défavorisées par la nature, comme cité dans Taanit (26b et 31a).

Monsieur Chouchani était profondément persuadé que la beauté était absolument futile et vide d’intérêt, il lui arrivait même de s’emporter lorsque l’on donnait de l’importance à la beauté.
Une jeune fille a, une fois, lâché en sa présence qu’elle recherchait un mari beau, ça ne lui a pas plus du tout.
On lui fit remarquer que Yaakov semblait donner de l’importance à la beauté, tel que c’est souligné au sujet de Ra’hel [cf. Bereshit (XXIX, 17-18) et Sefer Hayovlim (XXVIII, 9). Cependant, le Or Ha’haim Bereshit (XXIX, 18) s’écarte de cette lecture -et M. Chouchani semble le suivre.] et il finit par répondre : « Eh bien Yaakov avait tort ! » (cité par Salomon Malka dans Monsieur Chouchani, JCLattès 1994, p.132).

Je ne sais pas comment il expliquait les textes talmudiques comme celui mentionné plus haut qui attribuent et confèrent une importance à la beauté. Peut-être que si (-à ses yeux) Yaakov avait tort, les Sages aussi ?


De manière plus générale, une Hashkafa s’est développée et répandue durant les dernières décennies, une Hashkafa selon laquelle il conviendrait de mépriser la beauté, reléguée à l’aspect Gashmi, matériel et illusoire, et correspondant aux aspirations et centres d’intérêt de la Grèce (Yavan).

Ainsi, tout aspect positif est nié à la beauté et la propreté, ce qui explique que l’on peut voir parfois des juifs religieux faisant preuve d’un certain laisser aller concernant leur aspect extérieur.
Pas qu’il y ait eu un communiqué interne prohibant de se doucher ou de repasser sa chemise, mais cette Hashkafa « déborde » et se ressent par exsudation des Drashot et sermons imprégnés de cette idée.

C’est nouveau.
Ça fait partie des Hashkafot plutôt ‘Hassidiques qui, après-guerre, ont été lentement adoptées par le monde des Mitnagdim.

En Lituanie, les juifs et surtout les élèves des Yeshivot prenaient grand soin de leur apparence (peut-être parfois trop ?).

Si vous regardez les photos des élèves des Yeshivot lituaniennes d’avant-guerre, vous serez surpris.
(Rav Dovid Powarsky disait qu’on ne fait plus les « photos de classe » à Ponovez, car on croirait -en voyant la photo- que c’est une yeshiva ‘hassidique !...)

Depuis la fin des années soixante, un lent mais grand rapprochement idéologique s’est installé entre les ‘Hassidim et les Mitnagdim (ce qui a -par contre, heureusement contribué à calmer aussi les tensions entre eux) et ces derniers ont plus ou moins adopté (sans le reconnaître) les vues ‘hassidiques sur l’esthétique et la beauté et autres Hashkafot qui diffèrent nettement de celles des Rishonim.

Je n’adhère pas à ces idées, je pense qu’elles n’ont pu pénétrer le judaïsme qu’en raison des conditions de vies difficiles de (certains de) nos ancêtres entassés dans des ghettos insalubres malgré eux.

Les Rishonim ne « respirent » pas cette Hashkafa, ni même les ‘Hazal.
En fait, même chez les Ah’aronim (surtout les italiens) nous trouvons qu’une partie d’entre eux appréciaient/considéraient positivement la beauté.

[Le Mekor Baroukh (II, p.980) considère que cette attribution à Yavan de la beauté, qui serait absente du judaïsme, est avant tout une conception non-juive].

Les Maamarei ‘Hazal cités plus haut indiquent déjà l’importance du beau.
D’autres sont encore plus explicites ; voyez Rashi sur Dvarim (XIV, 1) qui cite le Sifrei expliquant l’interdit de se faire des entailles
לא תתגדדו. לא תתנו גדידה ושרט בבשרכם על מת כדרך שהאמוריים עושין, לפי שאתם בניו של מקום ואתם ראוין להיות נאים ולא גדודים ומקורחים
(=car vous êtes les fils de D.ieu et vous devez être beaux et non entaillés et tondus).

Voyez aussi le Braïta des 49 Midot (Otsar Midrashim p.295) qui est citée par le Yalkout Shimoni (remez 422) et Rashi sur Shemot (XXVI, 13), qui explique qu’en ordonnant que les tentures n’arrivent pas jusqu’au sol, la Torah nous enseigne que l’homme doit être sensible/prendre soin du beau.
למדה תורה דרך ארץ שיהא אדם חס על היפה

C’est aussi cité par R. Be’hayei (Shemot XXVI, 7).

Le Midrash (Vayikra Raba XXXIV, 3) nous raconte que les élèves de Hillel lui ont un jour demandé où allait-il et il leur a répondu : « faire une Mitsva ».
Curieux, ils lui demandèrent laquelle ?
Sa réponse fut : « se laver ».
Interloqués, les élèves demandèrent en quoi serait-ce une Mitsva et Hillel leur expliqua qu’en qualité de « Tselem Elokim », il fallait prendre soin de son corps.

Il est évident que Hillel a cherché à leur transmettre un message, qu’il est nécessaire d’être propre et qu’il ne faut pas considérer cela comme de la Gashmiout.
(Bien entendu, je ne pense pas que Hillel se douchait tous les jours, ce n’était absolument pas dans les mœurs, mais il ne s’agissait vraisemblablement pas non plus du vendredi, sans quoi les élèves n’auraient pas demandé en quoi c’est une Mitsva, le Kavod du Shabbat se serait imposé à eux comme une évidence.
C’était donc un jour de semaine et Hillel estimait qu’il devait passer aux bains et il a tenu à faire passer ce message à ses élèves.)


Il en va de même avec la fameuse mise en garde talmudique (Shabbat 114a) qu’un érudit en Torah qui se promène avec une tâche de graisse sur son habit mériterait la mort en raison du ‘Hilloul Hashem qu’il engendre.

Il faut lire entre les lignes et comprendre qu’on ne parle pas spécifiquement d’une tache de graisse sur un habit, mais qu’il faut -de manière générale- être propre et agréable à voir.

Nous savons aussi que les juges du Grand Sanhedrin se devait d’être beaux physiquement (cf. Sanhedrin 17a), ainsi que les Cohanim (du Temple) qui sont invalides s’ils ont un défaut physique (Vayikra XXI, 17)(Bekhorot 44b) et le Cohen Gadol qui devait être beau (Yoma 18a, Tan’houma Emor §4, Vayikra Raba XXVI, 9).
Voir le ‘Hinoukh (§275) qui explique l’avantage de cette beauté des représentants du culte.

Dans le même esprit, la Mishna dans Avot (VI, 8) nous enseigne que la beauté est souhaitable pour les (/convient aux) Tsadikim.

Quant aux précisions et détails sur la confection du Mishkan et la beauté du Beit Hamikdash (déjà dans la Bible), cela indique l’importance attachée à l’esthétique, qui se retrouve même dans la disposition des Cohanim à certains moments comme dans Psa’him (64b) :
כהנים עומדין שורות ...מאי טעמא אילימא ... אלא דהכי שפיר טפי

On nous dit aussi de veiller à embellir nos mitsvot, un beau Loulav, une belle Souka, un beau Shofar…(Shabbat 133b).

De Taanit (31a) nous voyons que les ‘Hazal n’ont pas hésité à consigner les paroles des jolies filles qui cherchaient un parti en encourageant à tenir compte de la beauté physique (en parallèle des « arguments de vente » des filles moches).


On nous parle encore de la beauté de :

Rabbi Yo’hanan (Baba Metsia 84a et Brakhot 20a),

de sa sœur (BM 84a),

de Rabbi Yishmael ben Elisha (Guitin 58a)


ainsi que son fils et sa fille (Guitin 58a),

de Rav Kahana (Baba Batra 58a) ,

Rabbi Abahou (Baba Batra 58a),


un jeune Nazir (Nedarim 9a),

Rabbi Yehouda Hanassi (Avot VI, 9),

‘Homa l’épouse d’Abayé (Ktouvot 65a)

Rav Assi (Kidoushin 31b)


Ce type de Maamarim ne correspond absolument pas à la mentalité qui règne à Méa Shearim, Bnei Brak ou Kiriat Sefer.
Le beau n’y a pas de valeur, si ce n’est une valeur négative que l’on attribue volontiers à Yavan.

Demandez-leur s’il « convient d’être beau et non tondu » ou s’il faut « savoir apprécier le beau (les beaux objets) et en prendre soin », vous verrez que ceux qui ne comprennent pas que vous faites référence à ces textes de Rashi (qui ne fait que citer des ‘Hazal), vous expliqueront que la beauté est une valeur grecque et que dans le judaïsme on dit plutôt « mensonge que la grâce, vanité que la beauté »…

Selon moi c’est une erreur profonde de Hashkafa que de chercher à annihiler un sentiment humain implanté naturellement en l’homme par D.ieu.

L’appréciation du beau est positive et naturelle.

Le Rav Bloch de Telz écrivait (Shiourei Daat I, p.194) qu’une personne qui s’évertue à asphyxier un sentiment ne peut pas arriver à la Shleimout, et plus l’homme grandit en Tsidkout, plus ses sentiments et ses perceptions se développent et l’appréciation du beau se développera aussi en lui en fonction de sa grandeur (וגם רגש היופי מפותח בו בכל תקפו).
[il explique c’est ce que les ‘Hazal ont voulu nous enseigner en racontant (Avoda Zara 20a) que R. Shimon b. Gamliel a été subjugué par la beauté d’une personne.]

Après avoir acquis cette conviction (que le monde religieux est dans l’erreur sur ce point, en méprisant tout ce qui s’apparente à la beauté etc.), j’ai eu plaisir à lire Rav Kook (Igrot, I, §117) qui écrit qu’il faut se débarrasser de ce défaut qui méprise tout embellissement physique, propreté, habillement et courtoisie.
[il visait en cela les Yeroushalmers, ces juifs installés à Jérusalem depuis des siècles, « l’ancien Yishouv », qui étaient (et sont toujours) assez dénués de courtoisie/politesse et qui méprisent le beau.]

Voir encore Orot hakodesh (III, §306) et Arpelei Tohar (§42).


Bref, la tradition juive est loin de la vision chrétienne qui voyait la beauté comme un maléfice diabolique, comme elle est loin de l’optique de la civilisation grecque valorisant l’esthétisme artificiel et vide de valeurs.

Le judaïsme confère à la beauté une importance en cela qu’elle encourage et contribue à l’épanouissement de l’homme (qui est un homme et non une machine) (Cf. Anaf Yossef sur Ein Yaakov Brakhot 57b, daf 92b, au nom du Mahari Mintz, Droush 2).


Ceci étant dit, il faut donc savoir ne pas se focaliser sur la beauté, surtout lorsqu’on cherche l’âme sœur.
On regardera avant tout la beauté de l’âme et non celle de son corps.

Mon grand-père disait « La BEAUTÉ, ça part (avec le temps), la BONTÉ ça reste ! » .

Cependant, à chacun d’être honnête avec soi-même et ne pas épouser une personne dont le physique le repousse et les Sages (Kidoushin 41a) ont interdit de s’engager dans un mariage avant d’avoir vu la promise, de peur qu’elle lui déplaise et qu’il ait du mal à l’aimer.
אסור לאדם שיקדש את האשה עד שיראנה שמא יראה בה דבר מגונה ותתגנה עליו ורחמנא ואהבת לרעך כמוך
(Donc s’il l’a vue mais qu’elle lui déplaît, c’est le même problème).

[Les sages disent aussi (Ktouvot 59b) אין אשה אלא ליופי ]

Donc il faut tenir compte du physique, mais ne pas se bloquer dessus.
La beauté n’est pas une valeur en soi, elle n’est là que pour aider à l’épanouissement, il y a des choses plus essentielles pour la réussite d’un couple, mais elle a aussi son importance (et aussi, il faut savoir qu’il existe une beauté « subjective »).

Nous ne disposons pas de moyens de mesurer ni de quantifier le niveau d’importance qu’il faut conférer à la beauté (il est donc difficile de pouvoir le transmettre et l’enseigner avec précision), le seul moyen de ne pas se tromper à ce stade est de bien comprendre à la fois l’atout de la beauté et sa futilité.

Vous pouvez donc espérer épouser une jolie femme (si c'est dans l'optique Leshem Shamayim définie plus haut) sans que cela ne contrevienne aux Hashkafot de notre tradition (mais je ne garantis rien pour les nouvelles Hashkafot...).
Mais je ne connais pas de prières rédigées en ce sens.

PS : ça alors ! je pensais vous répondre en dix lignes et voici que j’ai écrit toute une Meguila !
Il y a certainement des fautes de frappe ou d’orthographe et assurément d’autres personnages bibliques ou talmudiques qui sont mentionnés pour leur beauté, je suis sûr que les internautes enverront d’autres noms auxquels je n’ai pas pensé en rédigeant cette réponse.
Je n'ai pas le temps ni la force de me relire, il est déjà tard, veuillez excuser les fautes, merci.


Dernière édition par Rav Binyamin Wattenberg le Dim 28 Juin 2020, 8:09; édité 1 fois
Talmid Hakham en devenir
Messages: 18
Rav Wattenberg,

Merci infiniment pour ces précisions et éclaircissements.

Habitant actuellement à Bnei Brak, je me posais aussi ces questions car j'ai l'impression -j'observe- qu'il existerait une certaine forme de "sacrifice ultime" qui consisterait à prendre une femme qui n'est pas jolie (objectivement) justement pour se rapprocher encore et encore du Divin et pour ne faire que le strict nécessaire, à savoir Pirya véRivia, tout en s'éloignant de tout attrait pour le plaisir ou pour la beauté. Un peu comme si le couple et la relation conjugale étaient une case à cocher (une chose de plus qu'il faut faire).

Merci pour toute cette matière à réflexion.

Shabbat Shalom
RHY
Messages: 140
Hazak Rav pour cette très belle réponse !

Les dernières de vos interventions étaient courtes et concises, et longtemps ai-je attendu avec impatience un nouveau post comme celui-ci et qui vous ressemblent tellement!

Vous faites partie de ces rares personnes dont on apprécie la longueur d'écriture et la volubilité.

Merci et D-ieu vous bénisse !
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6335
A RHY :
Citation:
Hazak Rav pour cette très belle réponse !

Merci, merci.

Citation:
Les dernières de vos interventions étaient courtes et concises, et longtemps ai-je attendu avec impatience un nouveau post comme celui-ci et qui vous ressemblent tellement!

Oui, je n'ai pas toujours le temps ni la disponibilité d'esprit pour être long.


Citation:
Vous faites partie de ces rares personnes dont on apprécie la longueur d'écriture et la volubilité.

Merci, je ne suis pas sûr que beaucoup d'autres internautes partagent pleinement votre opinion, certains n'aiment pas lire lorsque c'est trop long.
Mais si vous appréciez mes messages longs, c'est très bien, je saurais qu'il y en a au moins un qui me lit avec plaisir même lorsque je suis bavard.

Citation:
Merci et D-ieu vous bénisse !

Amen.
Vekhen Lemar.
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6335
A Talmid Hakham en devenir:

Citation:
Habitant actuellement à Bnei Brak, je me posais aussi ces questions car j'ai l'impression -j'observe- qu'il existerait une certaine forme de "sacrifice ultime" qui consisterait à prendre une femme qui n'est pas jolie (objectivement) justement pour se rapprocher encore et encore du Divin et pour ne faire que le strict nécessaire, à savoir Pirya véRivia, tout en s'éloignant de tout attrait pour le plaisir ou pour la beauté. Un peu comme si le couple et la relation conjugale étaient une case à cocher (une chose de plus qu'il faut faire).


C'est une erreur, en effet et c'est prohibé par le Talmud.
Et même si -dans le meilleur des cas- cette erreur n'amènera pas le contrevenant à commettre des péchés (comme être dur avec son épouse et ne pas la réjouir), elle l'amènera certainement à une sorte de frustration et de morosité de la vie qui aura un impact (même) sur sa Avodat Hashem.
ça ne veut pas dire qu'il se montrera moins enthousiaste ni moins rigoureux dans la pratique des Mitsvot, mais moins humain.

Ce qui donnera des dérives auxquelles ce genre de société est désormais habitué, comme la fameuse manie de chercher les poux à autrui et voir le mal partout.
Ces gens sont souvent amenés à critiquer (de préférence avec virulence) toute attitude ou pensée ou Hashkafa qui ne correspondrait pas exactement à la leur, en se donnant le sentiment de bien agir et de défendre le Kavod du bon D. et de la Torah, comme Pin'has le Kanaï. Alors qu'en fait, ils cherchent à gagner leurs "galons" de Kanaï.
(Al Tikrei Kanaï éla Canaille)

Il y a là un manque de largesse de vue lié à une frustration qui les écarte du vrai but de la vie, alors ils se perdent dans des critiques de Kanaout pseudo-Leshem Shamayim.

C'est exactement ce que condamne le Netsiv dans sa Pti'ha au Sefer Bereshit en parlant des juifs de l'époque du second 'Horban qui étaient des "Tsadikim et 'Hassidim et Amalei Torah".
Mais alors qu'est-ce qui n'allait pas? Qu'est donc cette Sinat 'Hinam dont nous parle la Gmara (Yoma daf 9)?
C'est qu'ils considéraient toute personne qui ne se conduisait pas exactement comme eux en Avodat hashem, comme étant Tsedouki et Apikoros!

Et le Netsiv ajoute: bien qu'ils étaient réellement des "Tsadikim" pratiquant les Mitsvot avec toutes les 'Houmrot et qu'ils étudiaient BeAmal hatorah et behatmada, mais "D. ne supporte pas ce type de tsadikim".

Ces mots du Netsiv sont extrêmement profonds et -hélas, terriblement d'actualité.
mereparfaite
Messages: 1
"Habitant actuellement à Bnei Brak, je me posais aussi ces questions car j'ai l'impression -j'observe- qu'il existerait une certaine forme de "sacrifice ultime" qui consisterait à prendre une femme qui n'est pas jolie (objectivement) justement pour se rapprocher encore et encore du Divin et pour ne faire que le strict nécessaire, à savoir Pirya véRivia, tout en s'éloignant de tout attrait pour le plaisir ou pour la beauté. Un peu comme si le couple et la relation conjugale étaient une case à cocher (une chose de plus qu'il faut faire)."


A bnei brak vous avez observer ca?!??ou?!??!?vraiment ou????en israel dans les milieux religieux la beauté est HYPER importante(un peu trop meme),5kg de trop et la fille peut attendre.....je pense que c est un cliche de bnei brak extrêmement loin de la réalité ou alors vous trouvez juste ces israelienes très moches et que vous en avez fais des conclusions de saintete.....
Rafa2007
Messages: 34
Bonjour Kvod haRav, bien que ça ne soit pas strictement en contradiction avec ce que vous avez dit, comment expliquer la guemara qui dit que la beauté est un frein à l'intelligence (et ceux ayant les deux aurait été plus intelligents moches) ? C'est qu'il y a un aspect négatif ? Plus que ça : vous disiez que la beauté rehausse ce qui est déjà "bon" (personne avec des bonnes midot par exemple) or là c'est l'inverse qui est dit (qui semble être dit) ?

Merci beaucoup Rav
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6335
A Mereparfaite :
Citation:
A bnei brak vous avez observer ca?!??ou?!??!?vraiment ou????en israel dans les milieux religieux la beauté est HYPER importante(un peu trop meme),5kg de trop et la fille peut attendre.....je pense que c est un cliche de bnei brak extrêmement loin de la réalité ou alors vous trouvez juste ces israelienes très moches et que vous en avez fais des conclusions de saintete.....


Votre message s’adresse à et se rapporte au message de « Talmid Hakham en devenir », je le laisse vous répondre.

Néanmoins, pour apporter ma contribution, en ayant habité à Bnei Brak il y a une trentaine d’années, je peux témoigner des deux phénomènes ; effectivement il y avait des jeunes qui étaient très regardant sur le physique comme vous le dites, mais j’en ai aussi connu qui considéraient que c’était du Yetser Hara contre lequel il fallait lutter, Shéker Ha’hen vehével Hayofi.
C’est vraisemblablement de cela dont parlait « Talmid Hakham en devenir ». Mais, comme dit, je le laisse s’exprimer.
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6335
A Rafa2007 :

Citation:
Bonjour Kvod haRav, bien que ça ne soit pas strictement en contradiction avec ce que vous avez dit, comment expliquer la guemara qui dit que la beauté est un frein à l'intelligence (et ceux ayant les deux aurait été plus intelligents moches) ? C'est qu'il y a un aspect négatif ? Plus que ça : vous disiez que la beauté rehausse ce qui est déjà "bon" (personne avec des bonnes midot par exemple) or là c'est l'inverse qui est dit (qui semble être dit) ?

Non, la beauté reste une valeur positive, sauf qu’elle peut avoir un effet pervers.
Celui qui se laisserait aller à « s’occuper de sa beauté » perdrait son temps dans des futilités.
C’est à ce propos qu’on dit que sans la beauté il aurait été plus sage (Nedarim 50b et Taanit 7a-b), car celui qui est moche risque moins de concentrer sa pensée sur l’entretien de son aspect physique (et cf. Rashi qui explique que celui qui se croit beau n’aura pas assez d’humilité pour pouvoir retenir beaucoup de Torah).

Il ne s’agit pas « d’intelligence », il est possible d’être beau et intelligent, la beauté peut par contre porter préjudice à la « sagesse », si la personne accorde trop d’importance à l’aspect physique.

On ne peut pas se concentrer à la fois sur le physique et sur le spirituel sans que l’un n’empiète sur l’autre (par contre il est possible d’être beau sans se concentrer sur le physique).

De là, certains religieux ont déduit qu’il fallait cultiver le laisser-aller sur l’apparence physique, mais ça n’est pas convenable non plus.
Le Shla (Shaar Haotiot lettre Dalet -dans l’éd. classique d’Amsterdam tome 1 daf 63b) souligne que la propreté physique favorise la propreté spirituelle, alors que celui qui se néglige aura tendance à commettre des actes bestiaux, voilà pourquoi -dit-il, il faut veiller à être propre, ne pas paraître sale aux yeux d’autrui, et « se coiffer les cheveux et la barbe ».

[Je sais que c’est parfaitement à contre-courant dans certains milieux qui pourtant tiennent le Shla Hakadosh en très haute estime, voici donc ses mots en hébreu pour ne pas déformer son message :
גם מדרץ ארץ הוא לראות שיהיה גופו נקי תמיד, הן אברים הגלוים, הן אברים הנסתרים, הן מכל לכלוך, הן מכל זוהמא... וזולת זה הטעם, הוא בטבע נקיות הגוף מביא לידי התעוררות נקיות הנשמה, וכשאינו נקי נמשל כבהמה ועושה מעשה הבהמה. ... ויהיה כל גופו נקי, ויתקן שערו וזקנו כדי שלא יהיה מכוער אצל חבירו]

Et pourtant de nombreux religieux, et même de grands Tsadikim, ont dénigré le beau et n’y étaient plus sensibles, c’est à mon sens une erreur, même si je ne fais pas le poids face à ces Tsadikim, je dis seulement ce qui ressort du Shas et des Midrashim selon ma lecture, sans exclure que des choses puissent m’échapper, et je crois que ces Tsadikim sont ceux visés par les dires du Rav Kook que j’ai cités plus haut.
Parmi ces Tsadikim, j’en mentionne un : Rav Chajkin (voir le livre « Rav Chajkin, la Rabbanit », p.118).

Chez les Rishonim nous ne ressentons pas ce mépris du beau qui est fréquent chez les récents A’haronim.
Au contraire, Rabbi Yossef Ibn Kaspi conseillait à son fils d’épouser une femme de bonne famille, belle physiquement et par ses actions, mais de ne pas s’intéresser à l’argent. "אשה מבנות היחס, נאה בגופה ובמעשיה, ולא תתן עיניך בממון" (Divrei Moussar, §10, p.58).

Même chez les Rishonim qui ne l’écrivent pas toujours explicitement car ils n’en ont pas eu l’occasion ou n’en ont pas ressenti le besoin, on peut retrouver cette idée en lisant un peu entre les lignes.
J’indiquerais le Raavan (Rabbi Eliezer Bar Nathan) dans sa chronique sur la première croisade en 1096 qui souligne avec douleur la beauté des victimes (Gzeirot Ashkenaz Vetsorfat -Jér. 1946, p.77 et 79), ce qu’un Rav de Méa Shearim ne ferait certainement pas de nos jours.

Sans quoi, si la beauté était un défaut (ou sans valeur aucune), pourquoi ‘Hazal soulignent sur de nombreux Tsadikim qu’ils étaient beaux ? Comme Ra’hel ou Sarah, ou encore Adam ou Yaakov ? (cf. ceux que j’ai cités plus haut)…

C’est cette « nouvelle » Hashkafa qui a amené « Talmid Hakham en devenir » à écrire plus haut :
Citation:
j'ai l'impression -j'observe- qu'il existerait une certaine forme de "sacrifice ultime" qui consisterait à prendre une femme qui n'est pas jolie (objectivement) justement pour se rapprocher encore et encore du Divin … tout en s'éloignant de tout attrait pour le plaisir ou pour la beauté. Un peu comme si le couple et la relation conjugale étaient une case à cocher (une chose de plus qu'il faut faire).

Mais choisir une femme moche dans l’optique de se rapprocher du divin est assez insolite si l’on considère que les ‘Hakhamim (Kidoushin 41a) sont allés jusqu’à interdire de s’engager dans un mariage sans avoir vu la promise « de peur qu’elle ne lui plaise pas » et qu’il ait du mal à l’aimer.
Donc -a fortiori s’il l’a vue et qu’il confirme qu’elle ne lui plait pas !

Comment peut-on proclamer avec assurance « je suis au-dessus de ça et par conséquent au-dessus de la crainte des ‘Hazal » ? Et si c’est vrai pour aujourd’hui (qu’il est au-dessus de ça et arrive à l’aimer en dépit de son physique repoussant), qui lui dit qu’il y arrivera dans 10 ou 20 ans ? Qui lui dit qu’il arrivera 20 ans après à se maintenir dans un niveau de Kdousha tel qu’il ne regardera pas ailleurs ?

Mais bon, j’ai déjà écrit plus haut ce que j’en pense, il y a là deux visions du monde qui s’entrechoquent et se contredisent, faut-il ou non nier l’humain ?

Faut-il aspirer à « sortir » de son corps ou plutôt à l’élever vers le spirituel ?

Les Mitsvot sont-elles là pour nous transformer en martiens, en machines à faire des mitsvot, ou plutôt pour nous parfaire et nous rendre plus spirituels (tout en restant humains)?

Car je lie cette Hashkafa avec celle qui refuse de voir un Taam dans les Mitsvot, qui seraient toutes de pures Gzeirot Hakatouv et ‘Houkim sans aucune parcelle de compréhension accessible à l’homme.

Ça fait aussi partie des nouvelles Hashkafot qui ont bourgeonné il y a 2 ou 3 siècles et qui se sont exprimées durant le dernier siècle envers et contre tous nos ancêtres et toutes nos sources.

Le fond de cette « ma’hloket » est déjà souligné dans le Tana Debei Eliahou (§14 -daf 49a), savoir si c’est la Torah ou l’Homme qui est le plus important, voir Alei Shour (II, p.19). (C’est un vaste sujet, je ne sais pas si je suis très clair avec ces quelques lignes...)
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