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Evolution des Heterim

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linor
Messages: 3
Bonjour Rav Wattenberg,

Concernant la contraception, nous assistons à un changement depuis quelques années, même dans les milieux les plus orthodoxes, où les Rabanim permettent de plus en plus aux femmes qui le demandent pour différents motifs, essentiellement fatigue physique ou morale après des accouchements.

Je pense que nous sommes d'accord pour dire que ceci est relativement récent, il y a vingt ou trente ans cela se faisait beaucoup moins, les femmes orthodoxes le demandaient beaucoup moins et les Rabanim étaient plus réticents à donner ces permissions.

Aujourd'hui, même si la plupart d'entre eux cadrent ces permissions dans le temps (4 mois, 6 mois, 1 an), cela est devenu bien plus fréquent.

Pourtant, les femmes d'il y a trente ans et plus étaient certainement touchées par les mêmes symptômes après leurs accouchements successifs, fatigue etc..
Et pourtant bien d'entre elles ne demandaient même pas de Heter, elles subissaient le coup et avaient d'autres grossesses.
Et si on assiste aujourd’hui à plus de permissions des Rabanim, cela veut bien dire qu'ils prennent en compte et se rendent compte de la nécessité qu'ont ces femmes à "faire des pauses" et se reposer. Ou du moins ils comprennent ces demandes et sont disponibles pour les entendre. C'est bien pour cela que les femmes font le pas et soumettent leurs demandes.

Cela veut-il dire que c'était une erreur de la part des Rabanim et du monde orthodoxe à l'époque de ne pas prendre en compte l'état de ces femmes (puisque les demandes de contraception étaient mal vues) ?
Si aujourd'hui ils le comprennent pourquoi ne le comprenaient ils pas avant ?
La question est autant sur les rabanim qui étaient réticents à permettre la contraception que sur les maris et le monde orthodoxe en général, où cela était mal vu.

Merci de votre réponse

Je précise que cette question n'a pas pour but de critiquer le monde orthodoxe, mais c'est pour mieux comprendre les évolutions qu'il vit.
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6335
Je cite :
Citation:
Cela veut-il dire que c'était une erreur de la part des Rabanim et du monde orthodoxe à l'époque


Pas tout à fait, car ce psak était parfaitement adapté à une réalité pas si lointaine.

Néanmoins les choses évoluent, l’intérêt des femmes pour les enfants aussi. Il y a quelques décennies, il était extrêmement rare de trouver des femmes qui ne souhaitaient pas avoir d’enfant.
Aujourd’hui, sous prétexte que « c’est incompatible avec une vie professionnelle » ou que « ça ne permet pas de profiter de la vie », de plus en plus de femmes refusent d’avoir des enfants ou s’accommodent d’un seul enfant sur le tard.

Dans ces conditions, les dépressions post-natales prennent un autre poids… (contrairement à ce que vous écriviez : « Pourtant, les femmes d'il y a trente ans et plus étaient certainement touchées par les mêmes symptômes après leurs accouchements successifs »)

Mais malgré tout, je ne veux pas que l’on puisse s’imaginer que je fasse partie de ceux qui souscrivent à « l’assurance rabbin » qui impose une cotisation consistant à défendre systématiquement envers et contre tout les collègues même lorsque des torts leur sont assurément imputables.

Si à une époque la rigueur autour de ce psak avait sa raison d’être, plus récemment, à une période où elle devenait déjà moins évidente, plusieurs rabbins ont été très lents à la détente.

C’est pourquoi je dirais que :

Oui, je considère que ces rabbins se sont trompés, qu’ils ont commis une erreur et une erreur parfois très grave –et c’est peu dire, car leur erreur est à l’origine de nombreux drames familiaux qui ont parfois pris la forme tragique d’un suicide !

Suite à une naissance, une femme en Israël dans les années 90 s’est suicidée après 8 enfants et un refus des rabbins de considérer son moral affecté.

Ces rabbins devront en rendre des comptes car leur tort est bel et bien répréhensible dans la mesure où ils ont préféré se montrer « rigoureux » sur le dos des autres sans tenter de réfléchir et d’analyser la gravité de la situation.
La vie de cette dame et les conséquences de son suicide sur ses enfants et leurs (futurs) descendants étaient entre les mains de rabbins insouciants au point de déconsidérer sa souffrance car « non-légitime » selon eux…
C’est DRAMATIQUE !

Je me souviens à quel point j’en ai été bouleversé à l’époque, je trouvais cela non seulement dramatique mais surtout scandaleux.

Alors oui, bien entendu, on me rétorquera que si elle en est arrivée-là c’est qu’elle n’était pas tout à fait stable psychologiquement (etc.), mais je répondrais ceci : qui a dit que ces gens n’ont pas le droit à l’existence ?

Certes elle devait déjà être fragile même avant d’avoir son premier enfant, mais elle n’en est pas responsable et elle avait le droit de vivre comme les autres et si les psakim halakhiques des rabbins ne devaient considérer que les gens normaux, bien constitués, sensés et intelligents, on ne reconnaîtrait plus une grande partie des halakhot auxquelles on est habitué.

Le travail du rabbin consulté (peut-être pas pas par internet, mais au moins quand c’est en direct) est de tenter de percer le réel problème de celui qui le consulte (même s’il ne sait pas le formuler avec les termes halakhiques adéquats), de ressentir sa souffrance et d’analyser l’enjeu halakhique face à la réalité.

Il est évident qu’une souffrance psychologique assez forte pour pousser une personne au suicide est amplement suffisante pour créer une dérogation de ce type, surtout s’il s’agît de la femme et surtout s’ils ont déjà accompli la mitsva de piria verivia.

Il y a malheureusement eu d’autres cas, c’est ce qui est à l’origine de ce changement de position des rabbins qui se sont rendu compte que si des gens allaient jusqu’à se suicider, c’est qu’ils doivent réellement souffrir et pas juste le dire.
C’est une honte de devoir en arriver-là, combien de sacrifices a-t-il fallut !

Je ne soutiens pas certains courants qui se croiraient précurseurs en cela qu’ils autorisaient à tout va déjà avant les années 80 et ce, pour n’importe quelle raison, comme des calculs financiers.
Mais j’accuse tout de même les rabbins qui se disent stricts et qui ne le sont qu’en raison de leur manque de compassion ou d’intérêt pour la souffrance d’autrui.

Avant, les femmes enfantaient moins (de manière générale), les familles de plus de 14 enfants étaient très rares. Même 8 ou 10 était un score remarquable…
(La mortalité infantile était aussi très élevée, elle est aujourd’hui descendue à moins d’un demi pourcent en France B’’H.
On estime qu’elle y était de 30% en 1740 et de 15% en 1850.
Le progrès n’a pas été constant, il y a eu des régressions, mais depuis un siècle il n’y a pas eu de régressions conséquentes -en dehors de celles dues aux guerres).


Il faut bien comprendre qu’il est normal qu’il y ait des évolutions en fonction de l’évolution de la société et des réalités.
Même si la halakha reste la même, si la réalité change, appliquer la même halakha dans un nouveau contexte revient parfois à appliquer une nouvelle halakha.

Dès lors, ce changement doit bien s’opérer un jour ou l’autre et on est amené à se demander si ce changement n’aurait pas été justifié dès la veille du jour où il a été instauré.
(ce n’est pas si précis que ça dans la réalité, il n’y a pas une date fatidique où l’on passe d’une halakha à l’autre, mais je parle du changement d’attitude du rabbin, même s’il se fait tout doucement, chaque étape peut être considérée comme un changement radical qui aurait –parfois- pu être appliqué la veille…)


Il est donc parfois plus pénible pour une femme du XXIème siècle d’éduquer et de s’occuper de 10 enfants, que ce que ça pouvait l’être il y a 60 ans.

Parallèlement, il y a aussi ceux qui ont des enfants mais ne s’en occupent pas réellement, qui démissionnent de leur rôle de parent, ce qui leur « facilite » paradoxalement la tâche.

Rav Steinman, il y a plus de 20 ans, avait répondu à un avrekh qui avait de nombreux enfants qu’il abandonnait un peu en considérant qu’il n’avait pas le temps de les éduquer car il était pris par son étude (il était en effet d’une grande assiduité) : « tu crois que la mitsva de piria verivia c’est de faire naître des enfants et c’est tout ? Il faut les éduquer, pas seulement les placer sur terre et les y abandonner ».
Lorsque l’avrekh lui dit qu’il n’avait vraiment pas le temps, rav Steinman lui conseilla alors de ne plus faire la tfila, de ne la faire qu’une fois par mois et ainsi il pourrait consacrer ce temps à ses enfants.
L’avrekh choqué comprit le message.


Je cite :
Citation:
Je précise que cette question n'a pas pour but de critiquer le monde orthodoxe


Je précise pour ma part que cette réponse a pour but de critiquer ce qui doit l’être, sans tenir compte des préférences pour un milieu plus qu’un autre.

Comme je le disais plus haut, je ne souscris pas non plus au soi-disant modernisme des courants qui se veulent souvent totalement permissifs, en fait en raison de leur peu d’intérêt pour le respect strict de la halakha.

Mais je ne souscris pas non plus à l’assurance rabbin dont je parlais plus haut, je m’oppose aux rabanim qui -se disant soucieux du kavod de la Torah, se préoccupent surtout de leur kavod en refusant de reconnaitre les erreurs rabbiniques, je considère que c’est du ‘hilloul Hashem et du ‘hilloul Torah.

Il faut dire la vérité et aimer la vérité, refuser de dénoncer le mal et le Shéker, signifie ne pas vraiment aimer le Emet.


PS: je ne prends pas le temps de me relire, sorry, malgré qu'un tel sujet nécessiterait une relecture pour corriger les fautes et apporter quelques corrections et reformulations afin d'éviter les malentendus, mais comme je dois m'interrompre pour m'occuper de mes enfants, il serait incongru de me soucier de l'orthographe de ce message sans me soucier du message de ce post !
Donc: désolé pour les fautes et relisez calmement si vous trouvez mon post scandaleux.
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